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15/06/2009
C.G.JUNG et l'individuation
J'ai envie de revenir aujourd'hui sur la proposition que nous faisait C.G.JUNG de cheminer vers cette réalisation de soi qu'il appelait l'individuation. C'est dans son ouvrage Dialectique du Moi et de l'inconscient qu'il parle de la manière la plus claire de cette voie de l'individuation. Cette voie nous propose un chemin de vie dont le but est de devenir un être vraiment individuel en réalisant notre Soi dans ce qu'il a de plus personnel, de plus rebelle à toute comparaison. Pour suivre ce chemin il est nécessaire de se débarasser de tout excédent de bagages, de tout vêtement superflu, en particulier du déguisement social et des fausses idées que l'on se fait de son importance. Je dirais que, symboliquement, il faut voyager nu.
On ne doit pas confondre individuation et individualisme. L'individualisme, sous prétexte de particularités de l'individu, le met à l'écart de la collectivité et le dispense de ses devoirs envers autrui. Il est au dessus du panier. L'individuation, au contraire demande un "accomplissement meilleur et plus complet des taches collectives d'un être". Accomplir sa nature d'être est aux antipodes de l'égoïsme.
Le processus d'individuation, vu par Jung, s'accomplit avec des fonctions et des qualités qui sont de nature universelles. Ces fonctions sont utilisées pour faire d'un individu donné "l'être que, une fois pour toutes, et en lui même il doit être", en lui permettant d'atteindre son unicité par un mouvement de "centroversion" vers un lieu, l'inaccessible étoile, où se concentrent, en un mélange comparable au mélange parfait des alchimistes, la totalité des contenus du conscient et de l'inconscient. Atteindre l'individuation serait donc rentrer en possession de sa propre totalité unifiée, là où se résorbe l'antagonisme entre le conscient et l'inconscient. Notons que Jung parle d'une "voie, de "tendre vers". C'est le cheminement qui est important, le but, la totalité, étant au delà de toute possibilité de représentation. En effet, sa re-présentation à la conscience ferait aussitôt éclater la totalité en dualité. Il s'agit là d'une voie difficile, tout aussi problématique que la dernière phase du Grand Oeuvre des alchimistes.
La suite dans la prochaine note.
Ariaga.
16:55 Publié dans Alchimie, Jung et la psychologie des profondeurs, Philosophie | Lien permanent | Commentaires (37) | Tags : écriture, culture, société, philosophie, alchimie, psychologie, jung
Commentaires
Psychiquement, oser "se mettre à nu' est une épreuve très difficile ! Je t'embrasse Ariaga
Écrit par : lechantdupain | 15/06/2009
Quelque chose de très important (enfin ce que j'en perçois, connaissant si peu Jung)
tout d'abord le fait que ce soit un processus, que chercher à nommer la fin c'est la rendre duelle et donc passer à côté
cette nécessité de se "déshabiller" pour y accéder
et enfin ce rapport de l'individuation au collectif (ce qui fait qu'à l'opposé notre monde nous pousse vers l'individualisme qui en fait laisse le pouvoir à qqns)
Je crois sincèrement que pour atteindre cette vacuité dont on parle dans le bouddhisme, qui est la juste compréhension de ce que l'on est, en lien avec l'impermanence et l'intedépendance, ne peut se faire que si ce travail d'individuation est accompli en même temps
Certains pour avoir voulu atteindre cette vacuité sans ce premier travail de reconnaissance, ont décompensé fortement
merci à toi et belle semaine
Écrit par : Lung Ta | 16/06/2009
"C'est le cheminement qui est important"...
et aussi comme le dit Lung Ta " le fait que ce soit un processus"... processus ou cheminement... qui s'organise au coeur même de la conscience évolutive de la nature humaine (dans son ensemble) et qui, pour l'individu introduit des modifications, par phases, de son mode d'identification au "Je". Les deux premières phases identitaires entretiennent des peurs et des craintes de toutes sortes, le "Je" ne vise alors qu'à sa survie individualiste et matérielle, et lutte pour l'avoir, la possession, le devenir et le pouvoir.
La phase suivante génère al contrario un désir de réflexion, de calme et de paix... qui mènera peu à peu le "Je" à désirer entrevoir, percevoir une "vérité" plus profonde, un besoin de compréhension et d'indulgence tant envers soi-même qu'envers autrui... qui poussera encore ce processus vers le besoin, le désir de "connaissance" et de découvertes tant "scientifiques" que "spirituelles"... cette phase génère une intense créativité.
Parvenue à cette phase, à ce niveau de compréhension la vénération pour tout ce qui vit, la compassion et l'amour envahissent tous les aspects sensoriels de la "personnalité" qui devient dès lors "l'être qu'il est" et le manifeste... l'ultime phase, l'entrée dans la totalité unifiée ne peut en aucun cas être perçue par la conscience et ne peut donc être conceptualisée...
Et c'est pourtant de ce germe créatif que proviennent tous les concepts de "Dieu" de "divinités", toutes les quêtes et toutes les idéalisations....
Écrit par : Muttifree | 16/06/2009
merci Ariaga pour ce texte qui nous porte à réfléchir, et pour les commentaires qui déja sont passionnants.
ce terme d'individuation, dont tu nous expliques bien la différence avec l'individualisme, fait écho en moi.
c'est comme ci j'avais ainsi trouver le " chaînon manquant" à une réflexion qui me tracassait...
certains philisophes ont affirmé que "le retour à la source", en quelque sorte "la réintégration" serait collective et non individuelle.
ma lanterne se trouve ainsi un peu éclairée.....
près de toi sur le chemin.
Écrit par : mariedumonde | 16/06/2009
un peu à l'arraché mais cette note "de reprise pour moi" me touche plus que tu ne le penses...abandonner certaines choses peuvent aussi être cause de douleurs à venir mais là encore c'est une question de choix.
Écrit par : muse | 16/06/2009
@ Muse, je te réponds en premier car je veux que tu saches combien je suis heureuse de savoir que tu vas un peu mieux et que tu reprends doucement tes activités sur ton blog.
Écrit par : ariaga | 16/06/2009
Oser prendre des chemins de traverse, se débarrasser de toutes les scories, s'alléger pour enfin trouver le sentier qui nous conduira à la nudité de sa psyché ...
Écrit par : anneleau | 17/06/2009
Merci ! il est indispensable de toujours revenir là-dessus. Répéter.
Écrit par : cpatricia | 17/06/2009
Je connais peu Jung mais ce Post me rappel un rêve …
Je suis poursuivie par un homme depuis des années,
Et je passe mon temps à le fuir,
Pour cela je déménage de lieu en lieu,
Et mon « clan » m’accompagne dans ma fuite,
Ils m’avertissent lorsque l’étranger est proche,
D’ailleurs c’est mon « clan « qui depuis toujours m’a informée du danger qu’il représente pour moi.
Mais cet homme me retrouve toujours…
Car ce que je vis il l’a vécu avant moi et il connaît d’avance ma destination.
Alors c’est une fuite perpétuelle …
Jusqu’au jour ou je me pose et je m’interroge :
Qui je fuis ? Et Pourquoi ?
Quel danger réel représente-t-il ?
Ma fuite est basée sur les dires d’autrui et finalement ma crainte est peut être infondée.
Cet étranger partage mon destin, il me devance a chaque étape de ma vie, et je ne le re-connaît pas.
Et si cet étranger c’était moi ?
Etranger il est car il ne correspond pas a la représentation que je me fais de moi ou plutôt a la représentation que la sociétés se (a) fait de moi et a laquelle j’adhère (plus ou moins) puiqu’elle est socialement acceptable.
Alors au final, pour en revenir a l’individuation dumoins ce que j’ai cru comprendre, se mettre a nu , c’est se libérer de l’autre en soi de ses préjugés , et se donner l’opportunité de rencontrer « Je » et d’ enfin accéder a l’unicité.
Écrit par : Virginie | 17/06/2009
C'est très beau ton chemin Ariaga.
Je t'embrasse
Écrit par : danae | 17/06/2009
Je sais que j'ai toujours préféré Jung à Freud. Et comme je m'intéresse de près à la synchronicité, j'ai été agréablement surprise quand j'ai su qu'il l'avait étudiée.
Écrit par : MADmoiselle | 17/06/2009
Voyager "nu et sans honte"...
La question que Je me pose est : est-ce qu'au moment du grand départ (vers autre chose ou rien, selon les croyances), le puzzle est enfin reconstitué ?
Écrit par : Mû | 18/06/2009
Suite à ta visite, je découvre ton blog. Passionnant. Une première remarque quant à la réalisation de soi, cette "individuation". Je reste convaincu que l'on peut cheminer vers, quand on réussit à se dégager de la réalité quotidienne, souvent difficile, faite d'embûches, de contrariétés diverses...
Je te note dans mes liens.
A bientôt
André Claude
Écrit par : chief.gardener | 18/06/2009
Difficile quête! Mais rien n'empêche l'individu de sortir de son nombrilisme primaire et de s'impliquer dans l'amélioration des relations humaines...Comme dit le chanteur : solitaire solidaire...
Écrit par : photoeil | 18/06/2009
il est bon de temps en temps de trouver sur sa route la phrase ( le mot, le texte..) qui redonne une petite étincelle. C.Y dormait sur mes étagères : je vais " nous " réveiller. Merci
Écrit par : alix.b | 18/06/2009
j'oubliais : le titre de l'ouvrage de C.G.Jung est " l'homme à la découverte de son âme " ( le livre qui dort sur les étagères ). Encore merci
Écrit par : alix.b | 18/06/2009
C'est Jung qui a inventé (ou découvert) le concept de synchronicité.
Une fois qu'on a compris qu'on était tel un jeu de lego, une construction fabriquée de toutes pièces, on se prend moins au sérieux, et ça va déjà mieux...Ce n'est pas l'ego qui est intéressant, c'est la réalité qui se cache derrière...
Écrit par : Guern' de B. | 19/06/2009
@ Lechantdupain, se mettre à nu psychiquement est, en effet, l'épreuve la plus difficile. Il s'agit de se dépouiller des vêtements de la " persona " qui sont notre manière d'apparaître aimables aux yeux de la société. La peau de l'être psychique ! il est désagréable de s'écorcher !
Écrit par : ariaga | 19/06/2009
@ Lung Ta, très intéressant cette nécessité que tu mets en évidence de suivre le chemin de l'individuation pour ne pas être absorbé, néantisé, par celui de la vacuité.
Écrit par : ariaga | 19/06/2009
@ Muttifree, quand un commentaire est du niveau du tien mes lecteurs fidèles savent que je je fais pas de commentaire sur le commentaire. Je recommande seulement de te lire.
Écrit par : ariaga | 19/06/2009
@ Mariedumonde, cela me fais vraiment plaisir d'être un maillon de la longue chaîne de tes réflexions. J'apporte ainsi ma petite pierre sur ton chemin et tu la ramasse.
Écrit par : ariaga | 19/06/2009
@ Anneleau, oui, prendre des chemins de traverse mais une fois que l'on s'est engagé marcher résolument.
Écrit par : ariaga | 19/06/2009
@ Cpatricia, cent fois sur le métier remettez votre ouvrage...l'opus est fait d'incessantes répétitions.
Écrit par : ariaga | 19/06/2009
@ Virginie, le rêve est très intéressant en tant que rêve" d'école" , mais ce qui l'est encore plus c'est l'interprétation, révélant une belle maturité, que tu en proposes.
Écrit par : ariaga | 20/06/2009
@ Danae, tous les chemins sont beaux, à partir du moment où ils sont sincères.
Écrit par : ariaga | 20/06/2009
"Voyager nu", je suis d'accord, je le fais assez souvent pour me ressourcer. Loin des artifices, loin du superficiel. Bon week end à toi et à tous ceux qui passent.
Écrit par : elisabeth | 20/06/2009
Cela n'a rien à voir avec ton billet (pardon) c'est juste pour te signaler qu'Humeur Noirte a repris du service...
(Si tu veux supprimer ce comm. pas de problème).
Écrit par : Mû | 21/06/2009
@ MADemoiselle, non seulement Jung a étudié la synchronicité mais avec lui et après lui de très sérieux scientifiques ont travaillé sur le sujet.
Écrit par : ariaga | 22/06/2009
Mû, c'est une grande question à laquelle je me sens bien incapable de répondre. Je pense que certaines questions sont déjà "enrichies" par le fait d'être posées.
Écrit par : ariaga | 22/06/2009
@ Chief. Gardener, Ton blog aussi ma plait. Rien que son intitulé : Bassin nature ... si tu me mets dans tes liens je te rendrai volontiers la pareille.
Écrit par : ariaga | 22/06/2009
@ Photooeil, non, rien ne l'empêche, si ce n'est son monstrueux égoïsme...qui n'a d'égal que sa vanité.
Écrit par : ariaga | 22/06/2009
@ Alix.b, l'homme à la découverte de son âme, est un bon ouvrage pour s'approcher de la pensée jungienne. Je pense qu'il est aussi très bon de lire Ma vie. Bienvenue sur ce blog.
Écrit par : ariaga | 23/06/2009
@ Guern' de Bé, pourrais tu préciser ta pensée, certainement beaucoup plus pessimiste que celle de Jung ?
Écrit par : ariaga | 23/06/2009
@ Elisabeth, C'est la société qui nous impose ces vêtements pour que nous puissions présenter une figure acceptable, aimable. Nous ne pouvons nous en passer car vivre en société est important mais enlever quelques couches cela fait du bien.
Écrit par : ariaga | 23/06/2009
Salut,
La métaphore vestimentaire à ses limites. Elle donne une représentation à mon goût trop anthromorphique.
Le processus d'individuation n'a pas grand chose à voir, de mon point de vue, avec un déshabillage. Il est risqué de proposer aux gens une "mise à nu".
En effet, une fois qu'on est à poil, ou qu'on croit l'être, que faut-il faire ensuite ? Se regarder le nombril en se répétant sans cesse : "J'y suis arrivé !" ?
Pour moi, le processus est nettement alchimique. Je le vois comme une suite binaire déconstruction / reconstruction qui n'a en vérité pas de fin puisqu'il est alimenté par la vie quotidienne.
La mystique nous guette à chaque pensée de Jung, je crois indispensable de le rappeler fortement quitte à paraître rabat-joie.
Écrit par : jean | 24/06/2009
@ Jean, tu as raison je crois que je vais aller ma rhabiller. (humour). Je ne suis pas opposée à la mystique si elle n'est pas "suiveuse".
Écrit par : ariaga | 25/06/2009
Je comprends ce que veut dire Jung,mais,cette voie est dangereuse,je l'ai empruntée.On risque en étant soi, de se fâcher avec beaucoup de personnes. En fait, il faudrait apprendre la manière,il faut quand même rester sociable.Et, c'est difficile d'être diplomate,on n'est alors, jamais nu vraiment,entier.
Écrit par : ver00 | 17/08/2009