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03/09/2008
Handicapé
Toi, le handicapé anonyme dont l'ombre rampe vers la porte et les couloirs sans fin de l'hôpital,
le regard cherche la lumière de la fenêtre,
je voudrais découper ton nom aux ciseaux des mots, aux ciseaux des sons, dans la langue des oiseaux des anciens alchimistes.
Handicapé, caché derrière le H, la hache qui a coupé le fil, il y a l'an, ces années que tu comptes et peuples de tes rêves. Hand est la main que je voudrais te tendre pour l'invitation au voyage. Au centre je devine Icare et son vol plein d'espoir. Je vois aussi la cape tissée d'amour pour t'envelopper et le cap qu'il nous faudra tenir pour arriver au but ultime, à la dernière station des vacances imaginaires.
Toi, l'anonyme que l'on promène du lit au fauteuil et du fauteuil au lit, ta chambre est la dernière station de notre train.
Je viens te chercher, nous venons te chercher car je ne suis pas seule. Tout l'été nous avons voyagé vers toi dans le seul but, par la force de notre rêve, par la force de notre amour, de t'emmener avec nous. Pas dans un pays lointain, pas dans des lieux grandioses, simplement descendre le petit chemin, juste à gauche du banc des premiers jours de l'été, et marcher tous ensemble sur la plage.
Tu penses, tu ne dis pas, les mots aussi sont partis, tu penses, je ne peux pas marcher, mon corps s'est absenté.
Ce n'est pas important. Tu es moi et les autres, tu es moi et je suis celui qui est assis dans le fauteuil devant la fenêtre.
Tu es pieds nus et tu marches sur le chemin humide comme un enfant qui naît. Ce chemin qui conduit vers la mer. Sur la plage, le sable fin s'insinue entre tes doigts de pieds. L'odeur marine pénètre chaque pore de ta peau et la vague de la marée montante frissonne le long de tes jambes . Tu cours, tu danses dans la poussière bleue des gouttes d'eau. Tu n'es plus que sensations et le cri de joie qui monte à ta gorge nous le poussons tous ensemble.
Par une après-midi de fin d'été, dans un rayon de lumière, le long train de banc des vacances imaginaires est arrivé à destination.
Ariaga
16:35 Publié dans Alchimie, poésie, Vacances imaginaires | Lien permanent | Commentaires (56) | Tags : écriture, photo, poésie, société, vacances, spiritualité, nature
Commentaires
Très jolis texte, surtout pour ceux qui, comme nous, en connaissent quelques uns. Souvent, j'admire leur courage et volonté.
Bises !
Écrit par : patriarch | 03/09/2008
Essayons déjà d'accueillir cette année, les enfants handicapés dans nos écoles... ce n'est visiblement pas une priorité. On préfére sans doute donner 400 000 000 euros à monsieur Tapie ou sécuriser la maison de monsieur Clavier.
Écrit par : aliscan | 03/09/2008
très beau texte, Ariaga
mon amie handicapée des jambes me dit toujours "si je n'espérais pas re-marcher un jour, je me flinguerais tout de suite"
je t'embrasse..
Écrit par : ambre | 03/09/2008
Superbe récit. Je suis sûre que tu as réussi à faire danser sur la plage celui qui ne peux plus marcher.
C'est comme un miracle obtenu par tes simples mots.
Écrit par : Danae | 03/09/2008
sacré texte que tu nous fais partager ce soir Ariaga !
ça décoiffe, et c'est émouvant, bien sûr que nous l'accompagnons le passager du fauteuil il était avec nous dans le train cet été.
Cette communion est touchante, tu es vraiment extraordinairement épatante et surprenante.
Merci Ariaga décidément il vit bien ce labo !
bisous affectueux
marie
Écrit par : mariedumonde | 03/09/2008
@ Patriarch, je crois , en effet que, de l'anonyme qui les représente tous on peut arriver aux exemples que beaucoup d'entre nous connaissent.
Écrit par : ariaga | 03/09/2008
@ Aliscan, j'apprécie ta juste indignation !
Écrit par : ariaga | 03/09/2008
je pense souvent à eux et ne manque pas une occasion de m'extasier chaque jour devant le fait de marcher, voir, entendre.... Il y a là un miracle qui pousse à l'admiration comme à l'humilité. Mes amitiés.
Écrit par : jlb | 03/09/2008
Superbe, Ariaga, superbe et si généreux.
Que te dire d'autre que ceci : ce cheminement vers celui qui n'est plus habité par son corps est humaniste, délicat et beau. Tu es dans la beauté des choses du partage. Je t'embrasse. Merci. Chris-Tian.
Écrit par : Chris-Tian Vidal | 03/09/2008
Et souvent, aux embruns d' un sourire, perle au fond des yeux un océan de noblesse ...
Ce que la nature ôte aux membres habite désormais le coeur de l' âme mais le prix à payer est lourd, bien lourd ...
Le train n' arrive pas à destination, il commence une nouvelle expédition ...
Écrit par : Kaïkan | 03/09/2008
Merci pour ton commentaire sur mon blog.
Se surpasser, c'est bien dans la chanson et même dans l'air.
Quand la bêtise règne d'autres doivent se surpasser depuis leur relative exclusion.
Écrit par : PataTy | 03/09/2008
Douce et belle Ariaga, je le savais bien que tu es toute entière enveloppée dans les drapés violets de ma rose... Merci pour tout cet Amour déployé...
Je t'embrasse tendrement.
Écrit par : Mutti | 03/09/2008
Sans voix autre que celle du coeur qui tremble.
Merci pour ces mots, merci.
Écrit par : michelgonnet | 03/09/2008
"TOI L'HANDICAPE" merveilleusement bien écrit, être handicapé, c'est un combat de tous les jours, chaque, objet, chaque geste est un problème, même sur ce clavier je fais face à des complications, je suis Invalide d'un attentat, c'est terrible parceque çà ne se voit pas tellement, pour les gens ; handicapé = chaises roulantes - ou un membre en moins....c'est mon dos qui a tout pris, et touché à la moelle épinière...une chemise longue, un jeans, et quand je me gare à la place réservée pour handicapés, je passe pour un usurpateur
mes yeux, ont gravement été touché aussi.
Jack NYC
Écrit par : jack NYC | 03/09/2008
etre en capacité de voire l'Icare en chaque etre humain et en soi meme, quelle que soit la hauteur où il se trouve
je t'embrasse
Écrit par : Lung Ta | 04/09/2008
@ Ambre, je suis triste pour ton amie car je crois qu'il lui reste beaucoup à faire malgré la perte de ses jambes. Je suis allée me promener avec toi dans Paris. Un bon moment !
Écrit par : ariaga | 04/09/2008
@ Danae, je voudrais faire danser TOUS ceux qui ne peuvent plus marcher et aussi faire chanter ceux qui ne peuvent plus parler et aussi respirer à plein poumons ceux pour lesquels chaque souffle est un effort.
Écrit par : ariaga | 04/09/2008
@ Mariedumonde, ta présence attentive dans le Laboratoire est pour moi d'une grande aide.
Écrit par : ariaga | 04/09/2008
Il est des isolements physiques ou psychologiques.
Je connais quelqu'un dans ce monde, et la vie ne lui est pas facile, non...
ton texte est touchant ariaga, bonne journée...
Écrit par : le Pierrot | 04/09/2008
Il y a la douceur humaine dans ces paroles déposées; des pensées nutriments comme un baume pour ces corps différents.
Écrit par : SiL | 04/09/2008
@ Jib, je suis comme toi, respirer, voir entendre, se mouvoir, la nature nous a donné des aptitudes merveilleuses que nous utilisons un peu machinalement. C'est quand elles viennent à manquer que toutes ces merveilleuses fonctions prennent leur valeur.
Écrit par : ariaga | 04/09/2008
@ Chris-Tian Vidal, pour moi qui ai lu tes Carnets d'Asie, il est évident que ta sensibilité aussi est grande.
Écrit par : ariaga | 04/09/2008
@ Kaïkan, le regard est l'ultime lieu physique où transparait l'âme. Certaine sont affolées mais il est des âmes qui dans l'épreuve deviennent tellement lumineuses que leur lumière sort par le yeux... .
Écrit par : ariaga | 04/09/2008
@ Jack NYC, merci de ta visite. Je suis allée sur ton blog qui contient des photos à couper le souffle et je sais les épreuves que toi et d'autres ont subies. Tu fais preuve de beaucoup de courage.
Écrit par : ariaga | 04/09/2008
merci Ariaga, c'est toujours un plaisir de me promener avec toi, que ce soit à Paris ou ici ..:-)
je t'embrasse et te souhaite un bon week end !
Écrit par : ambre | 06/09/2008
@ Pataty, il m'arrive de rater des choses au sujet de mes amis car la vie fait que j' m'éloigne parfois un peu des blogs et je me demande ce que tu veux dire par "relative exclusion".
Écrit par : ariaga | 06/09/2008
@ Le Pierrot, tu as raison, l'enfermement psychique est terrible et opaque alors qu'il existe des handicapés physiques lourds qui sont très libres dans leur tête, et même joyeux.
Écrit par : ariaga | 06/09/2008
@ Michel Gonnet, c'est beau ton coeur qui tremble, c'est émouvant.
Écrit par : ariaga | 06/09/2008
@ Lung Ta, oui, quand Icare, ses ailes fondues par le soleil est presque arrivé au sol où il va s'écraser, c'est toujours Icare, celui qui n'a pas renoncé.
Écrit par : ariaga | 06/09/2008
Professeur de collège, je m'occupe depuis des années d'élèves d'UPI, (Unité Pédagogique d'Intégration). J'y ai connu mes meilleurs moments d'enseignant, dans ces cours où ils s'ouvrent au monde d'où ils sont un peu exclus. Ils ont des regards, des sourires, des reconnaissances (presque) toujours muettes qui sont des soleils pour le cœur, loin des faux-semblants, en direct de leurs âmes peu assurées qui se construisent aux milieu des autres. Tout handicap est terrible, mais l'amour peut le transcender.
Écrit par : èphême | 06/09/2008
P'tit coucou ariaga, tu es passée juste avant ma prochaine note qui sort à 16h30...
bon week end à toi...
ps : c'est bien de faire des notes comme celle-là, oui...
Écrit par : le Pierrot | 06/09/2008
Voilà qui exprime bien ce que quelquefois on n'ose pas dire, par peur peut-être. Et merci pour la visite, bienvenue chez moi.
Écrit par : la Mère Castor | 06/09/2008
SiL, tu as toujours des mots qui expriment exactement ce que je veux dire " des pensées nutriments comme des baumes pour ces corps différents " c'est vraiment juste.
Écrit par : ariaga | 06/09/2008
@ Mutti, ton blog est en harmonie avec ce texte avec son sous-titre : " Les sept merveilles du monde : voir entendre, toucher, goûter, sentir, rire, aimer. Pour certains il ne reste que la septième, aimer mais c'est la plus importante.
Écrit par : ariaga | 06/09/2008
@ Le Pierrot, merci de me dire que tu apprécies des notes comme celle-ci. Cela me réconforte car ce n'est pas l'avis de tout le monde et, cela m'arrive très rarement, j'ai du supprimer deux commentaires sur les "dérives" de mon blog.
Écrit par : ariaga | 06/09/2008
@ èphême, oui l'amour peut tout transcender. J'admire le travail que font des professeurs comme toi.
Écrit par : ariaga | 06/09/2008
Moi aussi, je connais quelqu'un...
Merci
Écrit par : laura | 06/09/2008
Aimer... la septième merveille, OUI, sans aucun doute, mais mon petit frère qui est handicapé mental et moteur a une sensibilité "merveilleuse"... il entend absolument tout, même un camion qui passe au loin,que personne d'autre n'entend, et cela le fait bien rire... quand il me touche, posant sa main sur ma joue ou sur mon bras, c'est pour me sentir au plus profond et reconnaître l'amour, il goûte la musique et la poésie comme jamais je ne l'ai perçu nullepart... beaucoup pensent qu'il ne fait que répéter les mots comme un petit "perroquet"... sans doute ne regardent-t-ils pas ses yeux, dans ces moments là... le corps de cet être là ne peut se mouvoir comme tout un chacun, l'esprit de cet être là ne peut communiquer comme tout un chacun... et pourtant... quelle profondeur dans l'âme de cet être habité, uniquement, par l'amour...
Écrit par : Mutti | 07/09/2008
Je suis sensible aux problèmes des handicapés, j'ai fait partie de leur monde pendant 16 ans (association) et je ne les oublie pas. Je suis triste quand j'en vois un. Je pense que dans chaque famille il y a plus ou moins des personnes ayant un problème d'handicap.... Merci pour ce texte afin de ne pas oublier ces personnes. Bon dimanche.
Écrit par : elisabeth | 07/09/2008
Chers tous,
Parler des handicapés, c'est bien,
ne pas les exclure, c'est mieux...
© Jack Maudelaire
Écrit par : Jack Maudelaire | 07/09/2008
@ La Mère Castor, c'est parfois difficile de prendre la parole pour les autres, mais tu as raison, il faut oser, même si on ne réussit que lmparfaitement.
Écrit par : ariaga | 08/09/2008
Quoi dire, comment aimer, essuyer les joues humides,
mes pensées chaleureuses vers vous, votre courage, la beauté et la sincérité de votre écriture...
Tendres journées.
Écrit par : patrick | 08/09/2008
@ Laura, je crois, hélas, que nous connaissons tous quelqu'un...merci d'être venue le dire.
Écrit par : ariaga | 09/09/2008
@ Mutti, ton témoignage est un véritable écho à mon texte, j'espère que beaucoup le liront.
Écrit par : ariaga | 09/09/2008
@ Jack Maudelaire, le plus important quelle que soit la forme du handicap, c'est de continuer à communiquer. Une simple pression de main, un regard, une pensée même, peuvent exprimer beaucoup d'amour.
Écrit par : ariaga | 09/09/2008
@ Elisabeth, je crois qu'il faut essayer (ce n'est pas facile) de ne pas être triste. Il vaut mieux leur envoyer des ondes de joie et de lumière.
Écrit par : ariaga | 09/09/2008
@ Patrick, "essuyer les joues humides" ta sensibilité d'artiste te fait toujours trouver les mots...
Écrit par : ariaga | 09/09/2008
Je ne vois pas ce qui peut choquer dans cette note, pfff...ton texte est beau, avec des mots bien choisis, oui...
mon nours t'embrasse ariaga, et moi aussi, bonne journée...
Écrit par : Le Pierrot | 09/09/2008
Ariaga, parmi tes belles réponses, celle que tu fais à Jack Maudelaire, me touche dans sa vérité bien sur, mais surtout dans son sens pratique, dans l'agir...
Tendre journée à vous.
Écrit par : patrick | 09/09/2008
@ ARIAGA A TOUS : je vous signale le texte poignant, qui fait écho à cette note, que Muttifree (dans mes liens à alchimie spirituelle ) a écrit sur un handicapé qui lui est proche.
Écrit par : ariaga | 09/09/2008
Magnifique texte de communion et d'humanisme.
Je trouve cela très beau qu'il ait pu toucher des gens qui sont concernés, en particulier Jack NYC et Mutti. J'avoue qu'en te lisant Ariaga j'avais peur que ton texte reste isolé, inconnu des gens qui sont vraiment concernés. Je me suis rendue compte que je m'étais trompée en lisant les commentaires, et j'en suis ravie... Leurs textes m'ont beaucoup touchée.
Bravo et merci Ariaga, et à tous les autres... Vous m'avez faite vibrer de différence, moi la "normale".
Écrit par : Pimprenelle | 26/09/2008
@ Pimprenelle, sois rassurée, mon texte a été lu et continue à l'être. Les commentaire sont le morceau émergé de l'iceberg et je les apprécie mais il y a aussi les mails, les diffusions, les silencieux dont je décèle la présence sur le compteur de lecture et ce texte à été le plus lu depuis les débuts du blog.
Écrit par : ariaga | 27/09/2008
Merci pour ce texte, profondément émouvant d’autant qu’il touche un domaine finalement trop peu abordé, ou alors de manière très superficielle occultant toute la profondeur et toute la richesse que peut apporter de côtoyer une personne handicapée… et surtout de prendre en compte cette personne dans son intégralité.
Je fais partie des privilégiés qui ont pu vivre une vraie relation avec une handicapée, il s’agissait de ma grande sœur, et je peux témoigner que j’ai beaucoup appris humainement et émotionnellement. Elle avait un don pour capter les instants de bonheur, s’en nourrir et les faire rayonner comme un soleil dans la maison.
Écrit par : Virginie | 17/06/2009
@ Virginie, ton mot de la fin "privilégiée" m'a beaucoup touchée. en effet ceux qui vivent avec des personnes handicapées apprennent à apprécier les gestes simples, marcher, respirer normalement, manger facilement, parler. Merci pour ton commentaire et pour avoir redonné une actualité à un texte qui a déjà quelques mois.
Écrit par : ariaga | 18/06/2009
Cette année-2010, les journées contre le racisme ont pour le thème plus spécifique le Handicape. Dans notre petite ville de Haute Savoie, Cruseilles, avec la complicité des autres associations et de notre Marie, notre association "Espace Théâtre" organise un "hold-up de la parole".
Nous arrivons dans un endroit, nous nous hissons en hauteur et nous disons les textes, les poèmes etc. Nous repartons aussi rapidement que nous somme arrivée laissant les spectateurs baignées des paroles des nos textes...
Nous somme à la recherche des textes parlants de l'handicape que nous allons dire en ville, avant lancement d'un marche de carnaval et au ESAT du Chosal lors des journées de réflexion sur les handicapes.
En me promenant sur la toile j'ai trouvé votre texte, très beau et très touchant.
Autorisez-vous notre association d'utiliser votre texte pour cet événement. Notre action est entièrement bénévole. Merci !!!!
Écrit par : Olga | 18/02/2010
@ Olga, c'est bien volontiers que je vous autorise à utiliser mon texte et je m'associe du fond du coeur à votre action.
Écrit par : ariaga | 18/02/2010