01/12/2006
Rêve éveillé
Quand on parle rats ou souris on entend le plus souvent des cris d'horreur et les nez se plissent de dégout. Chez moi, ils ont toujours suscité curiosité et intérêt. Je pense qu'après avoir organisé tant de razzias, survécu à tant d'attaques, souffert tant d'expériences dans les laboratoires où ils ont aussi été instruits, ces muridés doivent avoir considérablement évolué. Discrètement, bien sur, ils ont leur monde à eux et leur expérience collective secrète.
Il y a quelques semaines, mes rêves ont commencé à se peupler de rats. Genre grands surmulots un peu envahissants. ils venaient en groupe mais l'un d'eux se tenait à l'écart et semblait ignorer les autres. J'ai su, comme en rêve on sait des choses étranges, qu'il s'appelait Paulus. Pourquoi Paulus ? Aucun travail d'association symbolique ne m'a donné la réponse. Ce Paulus commençait à m'intriguer, c'est pourquoi j'ai entrepris de continuer mes rêves en suivant le processus du rêve éveillé.
Paulus m'est apparu, à la nuit tombante, dans les lents tourbillons d'un fin crachin, sur les berges d'un port désert. Il se tenait là, sa petite silhouette nichée dans le halo flou d'un vieux lampadaire dressé de guingois, assis sur une très grosse bite d'amarrage écaillée, rongée. Un carton défoncé avait du lui servir de tremplin.
Un minuscule béret noir entre ses petites oreilles translucides marbrées de rose, blotti dans une très chic gabardine mastic, fort bien coupée, assis à l'abri sous un tout petit parapluie écossais, il fixait les berges blêmes. Il soupirait de temps en temps, lissait ses moustaches douces, toussotait, raclait sa gorge, plissait ses gros yeux, puis gloussait d'aise tout à coup, sans raison apparente, en tortillant son derrière moulé dans un short Kaki aux plis impeccables, un peu incongru à cette saison sous une gabardine dans la bruine tenace. Je l'avais cru seul mais un minuscule chien-mulot émergeait de la poche de sa gabardine.
Je me suis approchée très poliment et j'ai tenté d'engager, maladroitement, un semblant de conversation. Je n'ai pas l'habitude de dialoguer avec les rats. Au début j'ai eu l'air de l'ennuyer. Il n'a lâché en guise de réponses que quelques brèves monosyllabes barboteuses. Alors, je me suis assise sur un vieux bidon Shell cannelé, marbré de vieux corail, coincé entre des rails tordus et rouillés.
Longtemps nous sommes restés silencieux jusqu'au moment où Paulus a sorti de minuscules lunettes, cage protectrice pour les timides, les a chaussées et a commencé une sorte de monologue dans un langage spiralique plein de mots assemblés au hasard mais d'une grande beauté symbolique. Plus je l'écoutais, plus je ressentais cette langue qui se construisait à partir de racines boueuses, mais qui ne demandait qu'à s'imprégner de lumière.
J'ai demandé à Paulus, qui semblait comprendre le langage des hommes, s'il voulait visiter mon laboratoire. Sans avoir le temps de lui préciser qu'il s'agissait d'alchimie spirituelle, je l'ai vu frémir d'une peur atavique. Il a sauté sur le carton et à disparu entre deux tas de ferraille.
Je suis sortie de mon rêve mais j'espère revoir Paulus. Je referai le chemin qui mène à lui. Il a l'étoffe, et surtout le langage de la recherche alchimique. Je compte aussi sur sa curiosité.
17:50 Publié dans rêve | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : écriture, littérature, rêve, alchimie
19/11/2006
Au carrefour des symboles
Aujourd'hui la pensée flotte et ne peux se fixer. Par exemple je pense que je n'ai pas répondu à la note très intéressante d'Arianil du 10 de ce mois. Il parlait de l'évolution d'une série de rêves si on y est attentif, par exemple en les notant sur un carnet. Il a parfaitement raison, le "discours de l'inconscient" se fait plus fréquent et, en apparence, plus clair. Il faut cependant se méfier car le fait d'être très à l'écoute demande un effort du conscient qui peut apporter des modifications. On se trouve dans le cas de l'observateur dans la physique sub-atomique. L'observateur modifie de par sa présence ce qu'il observe. Dans le cas du rêve, l'inconscient à son propre langage qui n'est pas le nôtre et plus nous le transcrivons plus nous le modifions. Mais il n'y a pas d'autre solution, il faut bien traduire et comme le dit Arianil à nous de ne pas nous perdre dans la forêt des symboles, qu'ils soient issus de l'inconscient collectif le plus abyssal où le reflet de notre quotidien.
En fait de symboles, je crois devoir préciser que, quand il s'agit de C.G. Jung il y a deux "écoles" (quelle horreur ce terme au sujet de Jung, qu'il me pardonne). L'une, la plus classique s'intéresse au scientifique rigoureux et à ses théories. L'autre, symboliste, accepte le côté parfois un peu fumeux, poète, alchimiste, certains diront mystique de C.G. Jung qui n'avait pas peur de plonger et parfois de se noyer dans les profondeurs les plus obscures de l'univers symbolique. Le représentant le plus remarquable, à mon avis,de cette deuxième voie est Etienne PERROT. Devinez qui je préfère ? ...
Je m'aperçois que, quand j'ai commencé ma petite topographie de la psyché en parlant de la persona comme habillement du Moi et alors que je projette d'aller bientôt à la couche suivante, en espérant un jour arriver au centre, le Soi, j'ai tout simplement oublié de commencer par la conscience humaine. Cela fait désordre, mais c'est ce qui me plait sur le blog : plus de suites logiques, un peu de surréalisme...
17:40 Publié dans Pensées, interrogations, aphorismes | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : écriture, rêve, philosophie, Jung
18/11/2006
Rêve d'ombre
Un ange somnambule qui joue un air de rien
Sur une pellicule d'univers
Un air de rien du tout
Des cerveaux poubelles plastiques remplies de livres hurlants de haine
Où pèse le couvercle lourd
Des additions
Des punitions
Pour faux croyants
Des corps devenus touffes d'herbe
Fleurs d'illusion
Des plantes aux bras tendus et aux bouches de chair
Happant la boue vivante des membres mutilés
Recrachés par la guerre
Des oiseaux de fer dans un ciel cendreux
Racontant l'histoire de leurs anciens dieux
Des miroirs qui regardent
Pleins de larmes
L'ombre des hommes encagée sur la pierre mourante
D'Hiroshima
La plaie rouge d'un sourire sur un ventre de femme
Des cris qui claquent comme une porte
Le métronome d'une mitraillette
Un enfant meurtrier
L'absurdité tressant des couronnes grotesques
Des soupçons mordus jusqu'au sang
Un rire qui grelotte tout seul
Et Job sur son fumier
Attendant des réponses
17:55 Publié dans poésie | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : Poésie, écriture, spiritualité, rêve
10/11/2006
Les Rêves selon C.G. JUNG
En ce moment les rêves sont très présents durant mes nuits ( le jour aussi d'ailleurs ! ) et la journée touchant à sa fin je m'en vais vous raconter ce que C.G. JUNG pensait des différentes sortes de rêves.
Il commence par déterminer la nature du rêve. C'est un "phénomène naturel" ne procédant pas de la volonté. En tant qu'évènement naturel il ne s'accompagne pas d'une justification alors que notre raison, elle, exige de savoir le pourquoi, le sens, etc., ce qui explique l'intérêt pour les ouvrages de clef des rêves. C.G.JUNG est tout à fait opposé à ce genre de classification univoque mais il est arrivé, à partir de sa pratique, à privilégier quatre significations :
La première, et la plus simple, est qu'il s'agit d'une "réaction consciente à une situation inconsciente". Ce genre de rêves a pour origine les évènements quotidiens.
Le deuxième cas concerne une "production plus ou moins spontanée de l'inconscient". Il y a alors conflit entre la conscience et l'inconscient provoqué par le fait que l'inconscient ajoute des fioritures à une situation donnée ce qui rend l'histoire incompréhensible au premier abord.
La troisième possibilité est celle où le rêve représente une tendance de l'inconscient à vouloir transformer l'attitude consciente du rêveur. Il s'agirait d'une sorte de "projet " de l'inconscient. Ceci est évidemment difficile à comprendre mais C.G. JUNG en fait une des bases de l'évolution, certains diraient de la "réalisation" d'un individu.
Dernière et très angoissante possibilité pour les esprits rationnels, le rêve fait émerger des processus inconscients ne paraissant avoir aucun rapport avec la situation consciente du rêveur. Ces rêves sont souvent impressionnants. Dans l'antiquité on les considérait comme des oracles, pour certains "primitifs" c'étaient des "grands rêves". L'Eglise les dénommaient somnio a deo missa (rêves envoyés par les dieux). L'inconscient apparait dans ce dernier cas comme une puissance créatrice.
C'est en s'appuyant sur les deux dernières catégories de rêves que C.G.JUNG s'élève contre l'idée généralement admise que le contenu du rêve est en rapport avec l'état conscient ce qui a engendré la théorie que l'explication du rêve se trouverait uniquement dans la conscience. L'inconscient ne serait alors qu'un épiphénomène. Or, écrit C.G.JUNG dans son livre "Sur l'interprétation des rêves"qui a inspiré cette note : "cette théorie est fausse, la réalité est même exactement l'inverse : l'inconscient est antérieur à la conscience... l'inconscient constitue une donnée originelle où la conscience va toujours puiser et se renouveler."
Je ne vous dit pas les controverses qu'il y a eu à ce sujet et c'est une autre fois que je vous raconterai ce que C.G. Jung pense de l'origine, des sources du rêve. La nuit est tombée et c'est l'heure où les lions vont boire...
18:05 Publié dans Jung et la psychologie des profondeurs | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : écriture, spiritualité, philosophie, rêve, Jung
03/11/2006
Qui est Ariaga ?
C. G.JUNG, Dans l'ouvrage ma Vie, que je recommande à tous ceux qui ne le connaissent pas, entreprend de raconter le "mythe" de sa vie.
Inspirée par cette démarche, Ariaga raconte, elle aussi, le mythe de sa vie. Ariaga n'a pas d'âge et ne se situe pas dans le temps.
L'émotion d'un moment d'amour, Ariaga est jeune, et pourtant sa jeunesse est passée.
Evocation d'une transition vers la mort, Ariaga est vieille, et pourtant elle est encore pleine de vie.
Ariaga n'est pas philosophe, ni écrivain, ni poète car elle n'oserait pas s'affubler de ces étiquettes tellement chargées de sens et de symboles. Sa spiritualité est une perpétuelle recherche.
Ariaga à connu les calcinations, les putréfactions, les dissolutions, les morts et les résurrections de l'Oeuvre alchimique. Et aussi de superbes conjonctions...
Regardez la photo au dessus de "à propos" Ariaga est dans cette bouteille en verre qui symbolise la cornue, cornue qui est dans la Nature dont Ariaga fait partie. Elle y subit d'incessantes transformations pendant sa recherche de l'Or spirituel. Ce n'est sûrement pas cette fois-ci qu'elle y parviendra mais elle recommencera, encore et encore.
Ariaga vit son rêve intérieur sur ce blog. Ne cherchez pas à la connaître en tant que personne, ce serait comme si vous marchiez sur une fragile dune de sable : elle s'effondre.
18:10 Publié dans blog et quotidien, rêve | Lien permanent | Commentaires (4) | Tags : écriture, rêve, JC.G.Jung, alchimie, Jung
22/10/2006
Convoi de rêves
Regarde passer le grand train sans début ni fin qui voyage tout au long de tes nuits poussé par un souffle venu d'ailleurs
Dans la lueur métallique des wagons tu devines des films absurdes hoquetant leurs aller et retour et des ombres si antiques qu'on ne sait plus rien d'elles
Ecoutes le train pulser dans ta nuit sous peine de mourir de silence
Regarde bien tu es dedans
16:55 Publié dans poésie | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : poésie, spiritualité, rêve
01/10/2006
Représentation symbolique
Pour continuer la réflexion sur la RE- présentation...
Les rêves sont une possibilité de contact avec une région étrange où se parle une langue incompréhensible. L'inconscient, cet Autre qui ne peut se présenter lui-même, délégue des ambassadeurs. Ces représentants symboliques vont donner une sorte de représentation théatrale. En effet, dans la plupart des rêves, on retrouve une certaine structure évoquant les différents actes d'une pièce de théâtre avec décors, dialogues et personnages amis ou ennemis. Le rêveur est spectateur ou acteur. Les scènes peuvent être surprenantes et défier les règles de la logique, mais les matériaux sont re-connus même si le sens de la représentation est confus.
La représentation est action quand les images sont décodées puis matérialisées. Jung, par exemple, a éprouvé le besoin de poétiser, dessiner, sculpter, bâtir la tour de Bollingen à des périodes de sa vie où il était assailli par des rêves et des visions. Il écrit dans Ma Vie :"Je devais en quelque sorte, représenter dans la pierre mes pensées les plus intimes et mon propre savoir … ."Il faisait oeuvre artistique en passant de l'immatériel au réalisé. En effet, la véritable démarche artistique se traduit par un acte personnel fort. L'artiste s'empare d'images imposées au Moi par l'Inconscient pour en faire un acte créateur qui n'est pas un RE mais une présentation originale.
Quand je pense à l'artiste et à la représentation je vois "présent" au centre du mot. L'artiste inspiré a reçu un don, celui de présenter aux autres quelque chose de nouveau qu'ils n'ont pas la chance de percevoir.
Ariaga
16:50 Publié dans Philosophie | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : jung, psychologie des profondeurs, philosophie, rêve