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14/12/2006

Les complexes

Pour C. G. JUNG, que je considère comme un Philosophe de la Nature " nouvelle vague, l'"inconscient" est un terme qui recouvre une expérience très ancienne de l'humanité. L'homme se trouve devant des forces inconnues, se manifestant sous la forme de représentations étranges. Il a l'impression que ce n'est pas lui qui en est l'auteur et la puissance avec laquelle elles peuvent le diriger lui fait peur. Autrefois ces forces se nommaient divinités, démons ou "esprits". C. G. Jung, par l'intermédiaire de rêves et de visions, a fait très jeune l'expérience de ces créations échappant, à des degrés différents d'altérité, au Moi. Le premier degré étant l'inconscient personnel. 

L'inconscient personnel Junguien n'est pas très éloigné de l'inconscient freudien qui lui a été transmis comme un "héritage déjà vénérable" mais dont il allait faire un usage quelque peu iconoclaste. Il est cependant beaucoup plus "flou" parce qu'il est contaminé par des contenus d'un inconscient très éloigné des possibilités de représentation à la conscience. Cet inconscient personnel, dont il faut bien comprendre l'absence de frontières étanches, est l'habitat des "complexes". 

Jung n'aime pas beaucoup imposer à sa pensée les limites des définitions et dans "l'homme à la découverte de son âme" il prétend supposer tacitement que tout le monde connait le sens de ce terme passé dans la langue courante et que tout le monde sait que l'on "a" des  complexes, mais il insiste sur le fait que l'on sait moins que des complexes peuvent "nous avoir". Pour lui, le complexe possède une force, une autonomie et un potentiel énergétique capables de produire une "modification momentanée et inconsciente de la personnalité appelée identification au complexe". 

Entre le simple lapsus et la "possession" il n'y a qu'une différence de degré. La force des complexes s'enracine dans des couches profondes, quasi biologiques. Autonomes par rapport à la conscience ils empruntent un réseau de voies de réactions où ils se chargent d'une énergie qui, arrivée au niveau de la conscience, se traduit en émotions et affects.  De vraies petites bombes qui aboutissent au Moi. Un moi qui est, lui aussi, un complexe, surtout quand il cherche à occuper toute la conscience et s'épuise à épaissir la couche de sa persona .

L e texte de C. G. Jung le plus éclairant sur les complexes, se trouve, à mon avis, dans "Un mythe moderne (p. 220), une oeuvre tardive.  Il y est question des complexes qui :

"dépouillés de leur diaprure personnelle et habituelle, apparaissant par conséquent comme ce qu'ils sont à l'origine, à savoir des formes originales des instincts. Supra personnel, ils sont d'une nature inconsciente, et les mêmes chez tous. Les complexes personnels prennent naissance aux points où se produisent des collisions avec la disposition instinctive générale. Ce sont des points de moindre adaptabilité qui restent particulièrement sensibles et dont la susceptibilité déterminera des affects qui arracheront du visage de l'homme civilisé le masque de l'adaptation."

Ce texte montre de quelles profondeurs peuvent remonter des ensemble de représentations obsédantes qui sont des messages entre les divers niveaux de l'inconscient et le Moi. Ce sont ces niveaux profonds que Jung  dénomme "inconscient collectif'. 

     Ariaga
 

 

10/12/2006

La finalité de l'Oeuvre alchimique

Cette note a pour but de compléter ma note du sept décembre sur les différentes couleurs des phases du processus alchimique. 

Selon C.G.Jung, dans "Psychologie et alchimie, les différentes classifications des phases dépendent surtout de la manière dont les opérateurs envisagent la finalité de l'Oeuvre. Certains alchimistes ont pour visée l'obtention de la "teinture" blanche ou rouge, d'autres recherchent la pierre philosophale, qui les contient toutes deux, et qui peut être , à la fois, la matière ou l'agent d'une transmutation. Il s'agit aussi, parfois, de la "panacée" : or buvable ou élixir de vie. Remarquez , et c'est ce qui me plait dans cette manière de penser, qu'en alchimie il n'y a pas de "ou"..."ou" mais des "et"..."et". On sort de la logique classique et une chose peut être elle même et son contraire ou tout autre chose. 

Plus "philosophique" est le projet d'obtention d'un "être entièrement mystique" nommé "Dieu terrestre", "Sauveur", "fils du macrocosme", que l'on pourrait comparer à l'"Anthropos gnostique", c'est à dire l'homme primordial divin, qui est aussi l'"âme du monde". C.G. Jung, s'inspirant de Paracelse, le décrit ainsi :

"Il est l'âme du monde qui met le Tout en mouvement et qui soutient le Tout. Sous sa forme terrestre primitive il est impur. Mais il se purifie progressivement au cours de son ascension dans les formes aquatiques, aériennes et ignées. Dans la quintessence enfin, il apparait en son "corps clarifié". Cet esprit est le secret qui fut caché depuis les origines"

Le projet des "philosophes alchimistes" est de purifier cette matière à laquelle s'est, en quelque sorte, mélangé l'esprit, pour redonner à ce dernier sa fonction motrice et directrice. En tant que matière et esprit, ils sont impliqués conjointement, matériellement et spirituellement, dans l'Oeuvre alchimique.  

08/12/2006

Les séries de rêves

Toute interprétation de rêve n'étant qu'une supposition, on se trouve, devant une abondante production onirique, dans le cas du chercheur qui s'attacherait à l'étude d'évènements dont il lui serait impossible de démontrer le sens et la régularité. C'est dans ce but que C. G.  Jung a privilégié les séries de rêves, espérant ainsi diminuer l'incertitude. Il en donne les raisons dans "Psychologie et Religion"(p. 58) :

"Si faire se peut, je n'interprète jamais un rêve isolément. En règle générale, un rêve appartient à une série de rêves. De même que dans le conscient, il existe une continuité, abstraction faite qu'elle est régulièrement interrompue par le sommeil, de même il existe apparemment une continuité dans la suite des processus inconscients. Cette continuité dont font preuve les déroulements inconscients est peut-être encore plus marquée que dans les phénomènes conscients. En tous cas, mon expérience se prononce en faveur de la probabilité que les rêves sont les maillons visibles d'une "chaîne" d'évènements inconscients."

Dans son ouvrage "Psychologie et Alchimie" C G. Jung, à la recherche d'un fil conducteur, examine une série de centaines de rêves. A l'époque ils étaient anonymes, mais on a su ultérieurement qu'il s'agissait de ceux du célèbre  physicien W. Pauli.

Quand on a la chance de pouvoir "contempler" une série de rêve il est possible de mieux suivre le "discours" (j'endosse la responsabilité de ce terme) du rêve et de contrôler les interprétations, les rêves eux mêmes s'en chargeant par des corrections et des réajustements. Mais, pour comprendre l'intérêt des séries il est utile de connaître l'hypothèse de C. G .Jung sur le "noyau central de signification", hypothèse hardie car elle remet en cause des concepts qui sont les repères de notre vie quotidienne. 

L'inconscient ne se soucie pas de notre perception du temps ou de notre idée de la causalité. Temps et causalité sont, en quelque sorte, "disloqués".  Les séries de rêves racontent une histoire dont la chronologie est parfois respectée mais , souvent, elle se perd. Ou bien le niveau de l'histoire apparente masque un autre niveau plus essentiel. Nous sommes incités à établir une chronologie des rêves et à les relier entre eux en se basant sur le fait qu'ils nous parviennent l'un après l'autre. Or, pour C. G. Jung ("Sur l'interprétation des rêves" p. 22, 23)

"Il n'est pas démontré que la suite réelle d'un premier rêve ne parvienne qu'ultérieurement à la conscience. La série qui nous paraît chronologique n'est pas la véritable série. Un nouveau thème peut très bien apparaître dans un rêve, avant de disparaître pour céder de nouveau la la place à un thème antérieur. La véritable configuration du rêve est radiale : les rêves rayonnent à partir d'un centre, et ne viennent qu'ensuite se soumettre à l'influence de notre perception du temps. Les rêves se subordonnent en réalité à un noyau central de signification."

Pour C. G. Jung, les rêves naissent dans un esprit qui n'est pas tout à fait humain et ressemblent plutôt à un "murmure de la nature" qu'à nos belles constructions logiques. Cette vision "radiale" de la chronologie onirique s'accompagne chez Jung d'une réflexion sur la causalité liée à la fois aux rêves et aux évènements de la vie courante. Il lui apparait que, dans certains cas, quand l'inconscient est particulièrement activé et le sujet très réceptif , on est conduit à postuler un facteur irréductible "par nature"à la causalité. Il faudrait alors admettre, écrit-il dans "Synchronicité et Paracelse"(p. 29)

"Que les évènements en général sont associés soit, directement en chaines causales soit, le cas échéant, par une sorte de lien transversal, de l'ordre du sens. "

A cette coïncidence d'évènements, reliés par hasard entre eux d'une manière significative, JC. G. Jung à donné le nom de "synchronicité". Mais, comme le disait Schéhérazade pour ne pas se faire étrangler ce sera une autre histoire que je vous raconterai un jour.

 

 

07/12/2006

Les couleurs des phases en alchimie

L'alchimie décrit dans ses différentes phases un processus de transformation. Les descriptions sont variées, contradictoires et rédigées en un langage symbolique des plus obscur. Il fallait toute l'obstination d'un C.G.Jung pour y trouver son miel...

Les auteurs, rarement d'accord au sujet du déroulement et de l'ordre du processus, se rejoignaient, cependant, sur des points essentiels. L'un d'eux était la division en phases, liées à des couleurs correspondant aux étapes de l'oeuvre. Comme elles étaient à l'origine au nombre de quatre, on les nommaient "quadripartition de la philosophie". Les quatre couleurs et les quatre stades, pour des raisons que C.G. Jung juge plus psychiques que pratiques, furent ramenées au nombre de trois, vers le XVI° siècle. Cette omission du quatrième stade du processus, serait liée au problème de la signification symbolique de la quaternité et de la trinité.

La nigredo, ou noirceur, représente le premier stade. Elle n'a pas de qualité unique et peut être , pour le "philosophe", l'état initial de la matière primordiale ou, pour celui qui travaille dans son laboratoire, le résultat de la phase de décomposition des éléments. Cette décomposition est suivie par une recomposition consistant en une union des deux polarités féminine et masculine. Et ça n'est pas fini: il y a dissolution, mort du produit de l'union et une nouvelle nigredo.

Ensuite vient l'albedo ou passage au blanc. Ce moment du processus a, pour C.G.Jung,  deux sens possibles. En simplifiant une citation de son ouvrage "Psychologie et alchimie"dont je m'inspire ici : l' âme (symbolique)libérée par la mort est a nouveau unie au corps mort et détermine sa résurrection ou bien,  l'ensemble des couleurs, appelée "la queue du paon" conduit à une couleur unique, le blanc qui contient toutes les couleurs. 

Ce stade du processus représente déjà, pour beaucoup d'alchimistes, un aboutissement. Il est symbolisé par l'argent, ou la lune, et C.G.Jung le compare à l'aube précédant le lever du soleil.

La transition vers le stade ultime, la rubedo ou passage au rouge, se faisait par la citrinitas, ou passage au jaune, associée au soleil et à l'illumination. Après la suppression de cette étape le rouge suivit directement le blanc. A ce stade, le rouge et le blanc, le soleil masculin et la lune féminine (souvent symbolisés par le roi et la reine)  peuvent, au moment où le feu atteint son acmé, célébrer leurs "noces chimiques"  .

Tout ceci  est très simplifié. Je tente seulement de donner un aperçu des termes courants de l'alchimie. Le processus est loin d'être linéaire. Il comprend d'incessantes "putréfactions", "ablutions", morts et résurrections, sans compter les copulations, de la matière. Je pense, comme C.G.Jung, que ces métamorphoses ont pour origine et conséquences les variations de l'état du psychisme de l'opérateur. Celui qui aura le courage de méditer de manière "philosophique" sur la symbolique de ces phases commencera, peut-être, à entrevoir l'intérêt, qu'elles présentent si on les compare aux phases possibles, ou impossibles,de notre évolution spirituelle.

 

05/12/2006

L'ombre, éclairée par C.G. Jung

Celui qui parvient à revêtir son Moi d'une persona bien épaisse possède un bon système d'adaptation et de communication avec le monde extérieur. Il y a un prix à payer. 

Tout ce qui a été refusé, parce que non conforme avec l'image de soi que l'on s'efforçait, parfois douloureusement, de construire ; tout ce que certain appellent péché, d'autres partie inférieure de la personnalité ; tout ce que l'on refuse d'admettre en soi, tout cela "tombe", en quelque sorte, dans la partie non visible du Moi. Non visible, mais cependant très proche car il s'agit d'acquisitions de la vie individuelle.

Le premier travail de celui qui veut tenter une transformation par l'alchimie spirituelle (C.G.Jung dirait le début de l'analyse), est donc de rendre l'ombre consciente et, même si elle semble repoussante, de la regarder bien en face, puis d'accepter. Ceci est possible avec du courage et de la bonne volonté. Le problème est que nous avons tous tendance à faire des projections de notre ombre sur les Autres. Je vais donner un exemple : Une femme a plusieurs jeunes nièces. L'une d'elle, qu'elle aime beaucoup, a le don de l'exaspérer et elle la houspille sans cesse. C'est plus fort qu'elle, elle la voudrait parfaite. Un jour, le frère de cette femme lui dit : Je ne comprends pas pourquoi tu as ce comportement avec elle, tu devrais la préférer, elle te ressemble beaucoup." Cette femme a soudain compris : sa nièce avait des traits de caractère qui avaient été les siens autrefois et qui, pour plaire à son entourage, avaient été "mis à l'ombre". C'est le genre de prise de conscience qui fait progresser dans la connaissance de soi, prise de conscience que beaucoup refusent.

Il ne faut pas croire que l'ombre cache uniquement des choses négatives. Si l'on en croit C.G. Jung dans Aîon:

  " ...Si l'on admettait précédemment  que l'ombre humain était  la source de tout mal, on peut maintenant, si l'on y regarde de plus près, découvrir que l'homme inconscient, précisément l'ombre, n'est pas uniquement composé de tendances moralement répréhensibles, mais qu'il comporte aussi un certain nombre de bonnes qualités, des instincts normaux, des réactions appropriées, des perceptions réalistes, des impulsions créatrices, etc."

Il existe une zone encore plus éloignée de la conscience, celle où résident l'anima et l'animus . Mais de cela on ne peut parler qu'après avoir fait monter sur scène l'archétype. C'est encore une autre histoire...

  
 

04/12/2006

Etienne Perrot et la voie alchimique de nature

Extrait de "La voie de la transformation". Editeur : La Fontaine de Pierre.

"Nous sommes ici au coeur du problème, de notre problème : la voie alchimique est la voie de nature (via naturae), comme l'est aussi la voie junguienne qui en est le nouveau nom. Celui qui l'emprunte accepte de soumettre la nature qui est au fond de lui, son essence intime, pure et immortelle, à l'influence de la nature universelle, ressentie soit sous une forme invisible, soit à travers une pierre philosophale déjà achevée, à travers un homme ayant fait le chemin, afin de réaliser en lui la nature au sens de Grégoire de Nysse, c'est à dire l'éclosion et l'accomplissement de l'être échappant au temps, de la fleur d'or. C'est le sens de la maxime célèbre de Démocrite, ou, pour parler comme les érudits, du pseudo-Démocrite, l'un des principaux alchimistes grecs : "la nature réjouit la nature, la nature vainc la nature, la nature maîtrise la nature. " Jung, moderne alchimiste, fait écho à ce vieil auteur lorsqu'il dit : "Ce n'est pas moi qui me crée, j'adviens bien plutôt à moi même."...

...Cette voie est donc d'une divine simplicité. Mais Platon disait qu'on ne doit pas vouloir parvenir trop tôt à l'Un. C'est le sommet de la montagne dont la vue stimule les énergies et qui paraît tout proche alors que des heures, et peut-être des nuits de marche en séparent encore. La pierre est "chose simple", mais elle résume en elle la complexité de l'univers, elle est un monde en petit, un microcosme. Le chemin qui y mène est, à son image, simple dans son dessin général et complexe dans son déroulement, puisqu'il serpente constamment d'un opposé à l'autre. Il faut viser l'unité, mais sans rien sacrifier des contraires qui doivent être réintégrés en elle. L'esprit ne doit pas s'évader du corps, l'ascension au septième ciel n'est pas la réalisation de l'homme... (p. 184, 185)

 

02/12/2006

S. FREUD et C.G. JUNG sur le Rêve

Aujourd'hui, grande paresse. Déjeuner copieux, vin capiteux, on se sent plutôt dans le ressentir que dans le réfléchir. Je pense à C. G. Jung, dont je vais simplement vous donner deux citaitions extraites de "L"analyse des rêves"(Albin Michel). L'euphorie post agapes me pousse cependant à dire que Jung était un grand amateur des nourriture terrestres. Il aimait la bonne chère, les bons vins et les femmes jolies et intelligentes. Il est curieux que  ce grand défenseur de la Vie dans sa totalité, ait été, le plus souvent, aseptisé par ses biographes, à commencer par lui-même dans "ma vie". Ce n'est pas aujourd'hui que je vais commencer à briser les statues et je me contenterai de livrer ces quelques lignes sur la nature du rêve :

... C'est là un point où je me différencie de Freud. On ne peut pas dire que le symbole, dans un rêve, est une façade derrière laquelle on peut se cacher et dire ensuite ce que le rêve signifie. Le symbole est un fait...

...L'idée de Freud, c'est que le rêve est rationnel. Moi je dis qu'il est irrationnel, en ce sens qu'il se produit tout simplement. Un rêve surgit comme un animal. Je pourrais être assis au milieu de la forêt, et voici qu'apparaît un daim. L'idée de Freud, c'est que les rêves sont préarrangés et je ne suis pas du tout d'accord avec cette façon de voir.  (p. 148, 149)

 

30/11/2006

La photo, blues

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Pourquoi un ciel si haut

Qui écrase la terre

Je suis comme un poisson

Qui  respire dans l'air

                 Aujourd'hui

Perdue dans l'ombre

Je cherche trop profond

Mes racines de vie

Là où pousse la croix

29/11/2006

Le Moi, selon C.G. JUNG

Le Moi, revêtu des habits de la persona, est le centre de la conscience et le sujet de tous les actes conscients. C'est à partir d'un ensemble d'éléments de représentation possédant un haut degré de continuité que se forme le sentiment d'identité. Je sais que je suis moi et pas un autre. Le moi est donc, comme le dit C.G. Jung, : "autant qu'on puisse en juger, une unicité individuelle qui demeure identique à elle même dans une mesure déterminée."( Aïon) C'est aussi un centre d'organisation et un lieu d'échanges, à la jonction entre l'univers intérieur et le monde extérieur. Il reçoit sans cesse des informations, subit des agressions déclenchant un flot ininterrompu de réflexions et de modifications.

C'est à partir de la relation entre le Moi et les domaines de notre expérience, entre les mondes du dedans et du dehors, l'objectif et le subjectif, que Jung a établi ses types psychologiques, introverti et extraverti, et déterminé les quatre fonctions conscientes dont dispose le Moi pour s'orienter et s'adapter "dans le chaos des phénomènes", tout en conservant son intégrité contre l'apport des éléments nouveaux : les faits extérieurs susceptibles d'expérience sensible et les objets d'expérience immédiate qui, eux,  sont intérieurs. (Je vous raconterai cette histoire des fonctions un jour où je me sentirai "inspirée".)

Dans cette espèce de géographie de la psyché que j'avais commencée avec "la peau de l'être psychique" on voit donc que le Moi se situe au centre de la conscience, comme une sorte de général en chef. Cependant, il n'est pas toujours le maître chez lui, car il doit supporter le poids de la conscience collective, mais il dispose d'un pouvoir, d'une énergie créatrice : la volonté. Grâce à cette énergie, l'homme peut influencer le cours des événements et éprouver un sentiment de liberté. Tout au moins si cette énergie est suffisante.

J'ai, à un certain moment de mon évolution, pensé que le Moi devait être le plus possible mis en veilleuse, mais C. G. Jung, et avant lui S. Freud m'ont confortée dans l'idée que le Moi doit être fort. Il est indispensable à l'équilibre de la psyché qu'il soit ferme et rassuré car la frontière avec le domaine de l'inconnu n'est pas étanche. Il est entouré par l'ensemble du champ de la conscience mais aussi par les  inconscients. Il se trouve dans la position d'un sous-marin immergé dans l'océan, avec ce que cela implique d'interactions la plus immédiate étant celle de l'OMBRE. Celui qui veut tenter le périlleux voyage dans les profondeurs de l'inconscient doit donc avoir un Moi particulièrement solide.  

28/11/2006

L'Alchimie Spirituelle au quotidien

   L'alchimiste, théoriquement chrétien, du Moyen-Age était panthéiste et pensait que l'énergie de Dieu se manifeste du plus minuscule au plus immense et que la Nature est imprégnée de cette énergie divine. Il était aussi convaincu que l'homme participe de cette nature divine et que seul le mélange en lui de qualités opposées l'empêche d'être parfait. C'est pourquoi l'alchimiste "philosophe de la Nature"ne cherchait pas seulement à transformer la matière vulgaire en or, c'est lui même qu'il voulait faire évoluer. Cette recherche a fasciné C.G.Jung car elle illustrait son idée d'un processus d'individuation conduisant un être humain vers sa totalité, son unicité. Mais mon propos, aujourd'hui, n'est pas de vous décrire les règles où les processus, aussi poétiques et culinaires soient-elles, des phases du processus alchimique mais de situer l'alchimie spirituelle au quotidien.

   L'alchimiste, inlassablement, expérimentait sur une matière qu'il espérait voir se transmuter. Il en est de même pour nous. Chaque nuit, en rêves, chaque jour par l'action quotidienne, nous évoluons. Nous nous transformons ou, plutôt, nous nous laissons transformer. C'est là, à mon avis, qu'intervient l'alchimie spirituelle : ne pas subir, mais agir. Etre son propre feu. Nous sommes un creuset, corps et esprit, et c'est à nous d'y accomplir le Grand Oeuvre. Il s'agit du travail de chacun mais je crois qu'il y a deux principes de base. 

   D'abord, admettre que nous avons un corps, que c'est un des matériaux de l'Oeuvre  et ne pas chercher à "s'échapper par le haut".  Ensuite, admettre notre "ombre" et les "nuits noires de notre âme". C'est à partir du plomb, et même du fumier, disent les alchimistes que l'on peut, par un lent travail de purification, et avec l'aide de Dieu, retrouver l'or originel.

   Si on sait recueillir ce qu'il y a de plus sombre en soi et le mettre dans le creuset, le travail peut commencer. Quand j'ai "accepté"ce que certains appellent péché et moi défaut, je ne vais pas avoir de remords mais rechercher l'or de ce défaut, c'est à dire la qualité opposée. Par exemple, si je suis affreusement goinfre, je ne vais pas culpabiliser et avoir des remords. Je vais essayer de transmuter cette goinfrerie en la qualité d'être un "fin gourmet". Si je suis terriblement menteur, je vais transmuter cela en un talent de conteur.

   Tout cela demande beaucoup d'efforts, regardez comme, certains jours, mon creuset sur ce blog est rempli de matière sombre, mais j'essaie et j'essaierai encore. C'est cela, pour moi, l'Alchimie Spirituelle quotidienn.

       Ariaga

 

 

25/11/2006

Pourquoi écrire ?

Pourquoi écrire sur ce blog ? J'ai médité là dessus ce matin, ça a muri, grossi, toute la journée et je pense avoir quelques réponses, mais il y en a certainement beaucoup d'autres.

Parce que c'est un espace de liberté. Par exemple, j'ai toujours beaucoup aimé écrire de la poésie et je m'en suis beaucoup privée. Pourquoi ? Certainement un problème de persona.

Je n'aime pas les discours de spécialistes mais on peut parfois être quelque peu entraîné dans cette perversion. Travailler avec un rempart de bouquins autour de soi sur la table. Ici pas nécessaire. Je fais une erreur de nom, de citation, de date, et alors ? Cela fera plaisir à quelqu'un qui se sentira plus savant que moi.   

Je crois, cependant, que la raison est plus profonde : Je rencontre des gens simples et fort intelligents. Ils ne sont pas bardés de diplômes universitaires mais leurs yeux brillent quand on leur parle de certains sujets. Alors que certaines personnes sont "statufiées " dans leur savoir, ces gens là sont de véritables cornues alchimiques. Finalement ce sont eux qui pratiquent le mieux l'alchimie spirituelle.

Je crois que j'écris pour une jolie fermière que je connais qui, quand elle descend de son tracteur après une journée harassante va prendre une bonne douche et clique sur mon blog (et sur d'autres).Et cette autre femme à laquelle un mot compliqué ne fait pas peur. Les dictionnaires ne sont pas pour les chiens dit-elle.  

Je crois aussi que j'écris pour montrer que la spiritualité, la réflexion, l'amour et la chair, le bien et le mal existent tous ensemble. Que c'est cela la vraie vie. Et que nous sommes sur terre pour évoluer.

Enfin, ne donnons pas dans l'angélisme. Il ne faut pas que je me raconte des histoires, j'aime les discussions sur le blog, même si elles sont parfois un peu pointues. Arianil m'a écrit que nous sommes les miroirs les uns des autres. Cela fait plaisir de se sentir intelligente ou appréciée. On ne change jamais complètement... 

23/11/2006

Le Yi King

Je voudrais simplement aujourd'hui vous donner envie, si  vous ne le connaissez pas, d'avoir en main et de consulter le Yi King, le lire des transformation. Il est traduit et préfacé de manière remarquable par Etienne PERROT. Editeur  : Librairie de Médicis. Les matins maussades où je ne sais pas trop que faire de mon corps et de mon esprit, je l'ouvre au hasard et j'y trouve souvent une réflexion, une intuition ou une coloration pour le reste de la journée. On pourrait dire grossièrement que c'est un livre de divination, mais il s'agit de bien plus que cela. Je ne saurais pas vous en parler aussi bien qu'Etienne Perrot. Pour vous donner un aperçu de l'importance de cet ouvrage très ancien je vous offre deux extraits de sa préface :

"Le plus ancien livre de la Chine en est aussi le plus moderne. Le Yi King offre à l'homme une clé intemporellement neuve pour pénétrer l'énigme de son destin. Il nous entraîne, au- delà de toute théologie comme de tout système philosophique, à un degré de profondeur limpide où l'oeil du coeur contemple l'évidence du vrai. L'unité est le fondement de l'univers. Mais, pour être fécond, le T'ai Ki (le Grand commencement) doit se sacrifier en se dédoublant car "à partir de ce qui est parfait, rien ne devient". Le monde ne nous révèle que le jeu des deux forces polaires, le mâle et la femelle, le plus et le moins, leurs épousailles et les dix mille êtres qui en sont les fruits. Le génial créateur des hexagrammes a su ramener cette variété sans limites à un schème mathématique enserrant la création comme un réseau, ou plutôt formant la trame qui le supporte et l'anime. ...

 

...Un savoir aussi ancien ne peut, on le comprend, s'exprimer en un langage conceptuel et logique. La vision du monde qu'il traduit est aux antipodes de celle de l'Occident. Notre science est analytique : elle isole soigneusement le phénomène étudié de son contexte ; celle de l'Orient est synthétique : elle apprend à tout embrasser d'un seul coup d'oeil et à lire les rapports. Dans l'immense symphonie du monde nous nous appliquons à écouter les différents instruments l'un après l'autre, nous interdisant par là de saisir le sens de la partition. Le sage chinois, au contraire, laisse monter à la fois tous les chants, ne négligeant pas la plus humble note de la timbale ou du triangle. Chaque être, chaque instant pris dans son intégralité est un visage du Tout, une facette de l'unité indescriptible."

Bien sur, C.G. Jung à porté un grand intérêt au Yi King. En particulier pour illustrer son concept de synchronicité. 

 

 

 

 

  

22/11/2006

Alchimie et Nature

Le terme "alchimie" a pour origine un mot arabe EL-Kimya, lui- même dérivé de Kemi qui signifie terre noire. Or, Terre Noire était un des noms de l'Egypte ancienne, ce qui conforterait l'idée que l'alchimie y a sa source. C'est Toth, dieu de la mathématique et de la science, qui serait à l'origine de la figure d'Hermès Trismégiste (dont j'ai déjà parlé), lui- même modèle du Mercure médiéval. Après de nombreux chaînons intermédiaires, et un passage déterminant dans la culture arabe, des idées, considérées comme néfastes par l'Eglise chrétienne, ressurgirent, un peu comme un courant souterrain qui remonte à la surface chez les alchimistes du Moyen-Âge.

    Les deux postulats qui servaient de fondement à l'alchimie étaient l'unité de la Nature, et même de l'univers. Cela allait du macrocosme au microcosme. De ce premier postulat découlait que, du fait de leur origine commune, leur différence n'étant qu'une diversification de l'unité. Tout élément pouvait donc se transformer en un autre. Il suffisait pour cela de posséder l'outil de transmutation : La pierre philosophale. L'alchimie décrit donc, dans ses différentes phases, un processus de transformation ayant comme justification le fait que le monde est un. 

Pour ces alchimistes du Moyen-Âge, qui se voulaient très chrétiens, mais sentaient un peu le fagot, la Nature, toute imprégnée de divinité, en vertu du principe : "tout ce qui est en bas est comme ce qui est en haut", était toute puissante. Elle était leur guide, leur étoile, avec l'aide de Dieu. C'était aussi la Mère  de toutes choses, et il n'y a aucun doute  sur sa toute puissance féminine. Dans un monde dominé spirituellement par l'image masculine on peut dire que les alchimistes ont fait remonter à la surface la part féminine de la divinité.

Ce que je vous raconte là n'est qu'une rapide approche du sujet mais à ceux qui se demanderaient pourquoi ces fous, qui passaient une vie entière à travailler et prier ( ils avaient aussi souvent une "soeur" qui travaillait avec eux...), sans, probablement, aller jusqu'au bout de leur quête, me fascinent, je répondrais qu'ils n'étaient pas si fous que cela. Ils n'avaient pas de connaissances scientifiques suffisantes, ils vivaient dans un monde de symboles mais certains scientifiques contemporains ne cherchent-ils pas l'unité de la matière ? D'autres ne  "spiritualisent" t-ils pas cette même matière ? Alors je crois que je vais encore longtemps m'intéresser passionnément à ces fous. Tout au moins à ceux qui ne cherchaient pas seulement à fabriquer de "l'or vulgaire" mais cherchaient cet or dans le secret de la nature et de leur âme.

 

 

 

 

20/11/2006

La conscience selon C.G. Jung

Je disais hier que j'avais omis, dans mes petits textes d'exploration de la psyché de parler, avant tout, de la conscience. Curieuse  erreur, serais-je inconsciente ?

Il ne s'agit pas ici de la conscience au sens religieux ou éthique. Simplement j'essaie de dire ce qu'elle représentait pour C.G. Jung. D'abord, le fait que la conscience humaine ait émergé d'un état originel d'inconscience est pour lui un sujet d'émerveillement. Il écrit dans "Les racines de la conscience :

"Tous les efforts  de l'humanité tendent à la consolidation de la conscience. Cest à cela que servent les rites, les "représentations collectives", les dogmes ; c'étaient des digues et des murailles élevées contre les dangers de l'inconscient. "

L'homme n'est devenu conscient que graduellement, l'émergence hors de l'indifférencié est récente et l'évolution est loin d'être achevée. Pour moi l'alchimie spirituelle est un des moyens de progresser. 

La fonction de la conscience est d'être le lieu où s'établissent les relations entre le Moi et les contenus psychiques. Si le Moi perçoit les rapports entre ces contenus, il y a conscience.

Pratiquement, C.G. Jung délimite la conscience par la frontière de l'"inconnu", domaine du non senti, non re-présenté, non pensé, bref, tout ce que l'on ne sait pas. Il distingue aussi toute une gamme d'intensités de la conscience qui fait qu'il n'y a pas de conscience pure et simple. Entre ce que l'on fait et le fait d'en être conscient il y a parfois une immense différence et même une véritable contradiction.

Le champ de la conscience est théoriquement sans limites car il peut sans cesse s'élargir par l'acquisition de nouveaux éléments, issus de l'inépuisable réservoir que représente l'inconscient. On se trouve dans une curieuse situation : un vrai conscient et un conscient dominé par l'inconscience cohabitent. Pour C.G. Jung, par de problème car il pense qu'il n'y a pas de contenu conscient dont on puisse dire avec certitude qu'on en a une conscience totale. En effet, cela supposerait une impensable totalité de conscience qui, elle même nécessiterait une perfection de l'esprit humain qu'on ne peut se représenter davantage. C'est un rêve et un but.  

Je livre à vos méditations du soir ces deux belles citation de C.G.Jung, la première extraite de "l'Homme à la découverte de son âme" et la seconde de "Symbolique de l'esprit":

"Quand nous nous demandons ce que peut bien être la nature de la conscience, le fait, merveille d'entre les merveilles, qui nous impressionne le plus profondément, c'est que, un événement venant à se produire dans le cosmos, il s'en crée simultanément une image en nous où, en quelque sorte, il se déroule parallèlement, devenant ainsi conscient."

"En effet, notre conscience ne se crée pas d'elle même, elle émane de profondeurs inconnues. Dans l'enfance, elle s'éveille graduellement et, tout au long de la vie, elle s'éveille le matin, sort des profondeurs du sommeil, d'un état d'inconscience. Elle est comme un enfant qui naît quotidiennement du sein maternel de l'inconscient. " 

 

19/11/2006

Au carrefour des symboles

Aujourd'hui la pensée flotte et ne peux se fixer. Par exemple je pense que je n'ai pas répondu à la note très intéressante d'Arianil du 10 de ce mois. Il parlait de l'évolution d'une série de rêves si on y est attentif, par exemple en les notant sur un carnet. Il a parfaitement raison, le "discours de l'inconscient" se fait plus fréquent et, en apparence, plus clair. Il faut cependant se méfier car le fait d'être très à l'écoute demande un effort du conscient qui peut apporter des modifications. On se trouve dans le cas de l'observateur dans la physique sub-atomique. L'observateur modifie de par sa présence ce qu'il observe. Dans le cas du rêve, l'inconscient à son propre langage qui n'est pas le nôtre et plus nous le transcrivons plus nous le modifions. Mais il n'y a pas d'autre solution, il faut bien traduire et comme le dit Arianil à nous de ne pas nous perdre dans la forêt des symboles, qu'ils soient issus de l'inconscient collectif le plus abyssal où le reflet de notre quotidien.

En fait de symboles, je crois devoir préciser que, quand il s'agit de C.G. Jung il y a deux "écoles" (quelle horreur ce terme au sujet de Jung, qu'il me pardonne). L'une, la plus classique s'intéresse au scientifique rigoureux et à ses théories. L'autre, symboliste, accepte le côté parfois un peu fumeux, poète, alchimiste, certains diront mystique de C.G. Jung qui n'avait pas peur de plonger et parfois de se noyer dans les profondeurs les plus obscures de l'univers symbolique. Le représentant le plus remarquable, à mon avis,de  cette deuxième voie est Etienne PERROT. Devinez  qui je préfère ? ...

Je m'aperçois que, quand j'ai commencé ma petite topographie de la psyché en parlant de la persona comme habillement du Moi et alors que je projette d'aller bientôt à la couche suivante, en espérant un jour arriver au centre, le Soi, j'ai tout simplement oublié de commencer par la conscience humaine. Cela fait désordre, mais c'est ce qui me plait sur le blog : plus de suites logiques, un peu de surréalisme...