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28/01/2008

Crise incendiaire

 

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     Ce matin la nigredo alchimique m'avait envahie de sa putréfaction. Tout me semblait vain, en particulier ce blog que j'ai eu la tentation de précipiter aux oubliettes ; envie de casser le vase de la distillation où le matériau se dessèche sur un athanor parfois trop brûlant, parfois rempli de cendres froides.

     Quand je lis dans mes mails, écrit par un inconnu, que l'on n'ose laisser de commentaires sur le blog de peur de ne pas être à la "hauteur", je me dis : pauvre idiote d'Ariaga, c'est l'échec complet. Tu voulais écrire pour tous, laisser simplement s'exprimer les amis intérieurs qui t'habitent et te voilà sur des "hauteurs" auxquelles tu as, depuis longtemps déclaré la guerre. Tu vis retirée sur les bords d'une mer bretonne et voilà qu'un (ou une) pervers t'a inscrite (en utilisant ton email) dans l'annuaire des psychanalystes de Paris." . Et me voilà psychanalyste freudien !

     Il y a aussi ce blog que je regarde avec des yeux étrangers. La liste par catégories, tout à fait arbitraire et peu égalitaire. Cette manière d'expliquer, de raconter, Jung, l'alchimie, n'y-a-t-il pas là une pointe de paternalisme (maternalisme ?). Vouloir faire trop simple c'est mépriser, moins accessible, c'est exclure. Certains m'on demandé d'être plus moi-même, vous voyez ce que cela donne, des envies incendiaires.

     Alors, face à la mer, dans un bidon, j'ai brûlé un tas de notes inutiles et prétentieuses amassées depuis des années. Maintenant je suis presque nue. 

     J'ai regardé à nouveau le blog et j'y ai trouvé des commentaires lumineux. C'est bon pour éclairer la noirceur de la nigredo. Et les crises aussi c'est bon, elles engendrent une libido, une force psychique, qui pousse à la transformation, à de nécessaires transmutations.

           Ariaga.

  
 

 

 

25/01/2008

La double personnalité de C. G. Jung

    Impossible d'aller plus loin dans mes notes sans vous parler de la double personnalité de C.G.Jung qui s'était aperçu, dès les premières années de sa vie, sans avoir aucune notion de psychologie ou de philosophie, de la présence en lui d'une seconde personnalité. Par exemple, encore enfant, il se demandait, après un rêve très impressionnant : "qui parle en moi". Il dénomme dans son autobiographie Ma vie ces deux pôles de son être "n°1" et "n°2". Il les décrit ainsi  (Ma vie,p. 65) :

"L'un était le fils de ses parents ; celui-là allait au collège, était moins intelligent, moins appliqué, moins convenable et moins propre que beaucoup d'autres ;  l'autre, au contraire, était un adulte ; il était vieux, sceptique, méfiant et loin du monde des humains. mais il était en contact avec la nature, face à la terre, au soleil à la lune, aux intempéries, aux créatures vivantes et surtout à la nuit, aux rêves et à tout ce que "Dieu" pouvait évoquer immédiatement en moi."

    Parallèlement à son moi humain bien différencié, le jeune Jung avait le bouleversant et intraduisible pressentiment de l'existence d'un "autre", en relation avec une dimension plus vaste. Non seulement l'"autre" n'avait pas perdu, comme c'est souvent le cas pour l'homme contemporain, une intime relation avec la Nature, mais il connaissait, je pourrais presque dire ressentait, Dieu comme un mystère secret et personnel. Il avait le sentiment d'une participation à quelque chose qui n'était pas lui (Ma vie, p;87) :

"Un peu comme si j'avais été touché par un souffle venu de l'univers astral et des espaces infinis ou comme si un esprit invisible était entré dans la chambre ; un esprit disparu depuis longtemps mais qui serait continuellement présent dans l'intemporel et jusque dans un lointain avenir. Les péripéties de ce genre étaient entourées du halo d'un numen." 

     L'"autre monde" auquel il eut accès très jeune par l'intermédiaire des rêves était celui d'un inconscient devenu perceptible à un âge où il n'est généralement pas activé. Cela explique certains comportements névrotiques et les nombreuses hésitation de Jung pendant son enfance et son adolescence. Les dialogues avec son autre intérieur le laissaient souvent déstabilisé, en particulier au moment de choisir une orientation pour ses études car, en lui, le numéro 1 et le numéro deux, qui avaient des goûts très différents poursuivaient leur lutte pour la domination. 

   Jung finit par se décider à étudier la médecine. Demeurait le problème d'une image intérieure difficile à assumer  car, comme dans son enfance, deux images s'affrontaient en lui. Son aspect n°1 se présente, selon ses dires, comme un jeune homme assez antipathique, ambitieux, peu doué, instable et aux manières douteuses. L'aspect n°2 considère le n°1 comme une charge ingrate, alourdie par une quantité de défauts dont les plus graves sont le manque de compréhension et d'ordre, en particulier en ce qui concerne la philosophie et la religion. Ce n°2 n'est pas vraiment un "caractère" mais plutôt une sorte de "vision totale", et dépourvue d'indulgence, de la nature humaine. Cette vision voudrait s'exprimer mais elle répugne à le faire par l'intermédiaire "épais et obscur" du n°1. Un autre aspect, qui me semble très intéressant du n°2, car il annonce déjà le Jung de la maturité,  est qu'il "se sentait en secret accord avec le Moyen Âge."

   Arrivé à la fin de ses études secondaires Jung se trouve psychologiquement dans une situation critique qu'il décrit ainsi : "Quand le numéro  2 prédominait, le numéro 1 était enfermé en lui et suspendu ; inversement le numéro 1 considérait l'autre comme un royaume intérieur obscur." Il frôle le précipice d'une dangereuse dissociation de la personnalité quand, quelques mois après, il fait un rêve "inoubliable "et salvateur (ma vie, p.110):

"C'était la nuit, à un endroit inconnu. Je n'avançais qu'avec peine contre un vent puissant soufflant en tempête. en outre il régnait un épais brouillard. Je tenais et protégeais  de mes deux mains une petite lumière qui menaçait à tout instant de s'éteindre. Or il fallait à tout prix que je maintienne cette petite flamme : tout en dépendait. Soudain j'eus le sentiment d'être suivi ; je regardais en arrière et perçus une gigantesque forme noire derrière moi. Mais, au même moment, j'avais conscience que - malgré ma terreur - sans me soucier de tous les dangers, je devais sauver ma petite flamme à travers nuit et tempête."

 Ce rêve fut déterminant car il lui trouva un sens qui le guida jusqu'aux débuts de l'âge mûr. Il facilita son insertion dans la société et augmenta sa capacité de décision. Il comprit que sa personnalité n°1 portait la lumière et que la n°2 la suivait comme une ombre. La petite flamme, c'était sa conscience, l'unique et le plus précieux trésor en sa possession. Sa mission, à cette période de sa vie, était de de conserver cette flamme, si petite et si fragile par rapport aux puissances de l'ombre. Il lui fallait aller dans le monde de la surface, un monde qui ne veut rien savoir des secrets insondables des profondeurs, et s'y consacrer aux tâches quotidiennes. Cela représentait un lourd sacrifice pour ce jeune homme d'un caractère introverti qui se voyait contraint d'aller vers l'extérieur.  

   Jung choisit donc d'écarter sa personnalité numéro 2. Cependant, preuve que son cheminement était déjà amorcé, c'est avec une belle maturité qu'il comprit que renier complètement ce côté serait une "automutilation".  Le n°2 devint flou, mais il s'installa définitivement à l'arrière plan de sa vie.

   A la lecture de vos notes ou de vos commentaires,  je pense que certains se retrouveront plus ou moins dans cette double personnalité de Jung.

         Ariaga
 

 

 

 

 

 

22/01/2008

Ne pas se fier aux apparences

   Je vous ai déjà parlé du livre Les devoirs du coeur de  Bahya Ibn  Paqûda,  philosophe juif d'espagne du XI° siècle qui écrivait en arabe, la langue de la culture de l'époque, et fut ensuite traduit en hébreu par Juda Ibn Tibbon et de nos jours par André Chouraqui dont les dons poétiques donnent à cet ouvrage un souffle à la fois biblique et très moderne. Ces textes se situent aux carrefour du judaïsme, du christianisme et de l'islam et montrent la possibilité d'un fructueux dialogue entre les trois religions monothéistes.
   Les devoirs du coeur, sont un guide de la vie intérieure et du cheminement vers le divin et je trouve que certains passages s'appliquent tout à fait à notre société contemporaine de l'apparence, en particulier celui-ci où il parle de ceux qui jettent l'invective et divulguent la méchanceté de ceux qu'ils considèrent comme inférieurs sur le plan spirituel : 
 
   " Comment mépriserai-je et confondrai-je ceux dont j'ignore le coeur, la conscience secrète et ce qu'ils sont devant Dieu; la vie intérieure d'un homme, extérieurement méprisable, peut donner un lumineux démenti à son apparence. les prophètes ont confondu et exhorté leurs contemporains par la permission du Seigneur qui voyait leur coeur et leur intime vilenie.  Je suis trop ignorant pour pénétrer les consciences ; celle qui me paraît méprisable, peut être à mon insu meilleure que ce qu'elle laisse voir, et meilleure que je ne le suis devant Dieu. Si un tel me semble mauvais, la cause peut en être simplement due à son ignorance de ses obligations divines, et cela le rend-il plus excusable que je ne le suis dans ma science. Dieu juge l'homme selon ce qu'il sait et je suis plus coupable de mes transgressions préméditées que ne peut l'être celui qui agit par ignorance ; celui-ci se rebelle contre Dieu par aveuglement et inadvertance ; moi, j'agis de propos délibéré, avec toute ma lucidité. Il est également possible que sa méchanceté soit une apparence recouvrant un bien caché, enfoui, contrairement à ce qu'il en est pour moi ; lui étant ainsi plus digne de la miséricorde et du pardon de Dieu ; un seul de ses mérites vaut peut-être mieux que les miens car Dieu seul le connaît et nul ne le loue ni ne l'honore ; il n'en est pas ainsi pour moi dont l'aspect seulement est plus reluisant." (p. 361, ed. Daniel Radford)
 
  Je pense que l'on peut lire ce texte sur plusieurs plans et qu'il est tout à fait d'actualité. Bonne méditation.
       Ariaga
 

20/01/2008

Mur effondré

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     Descellées de leur socle par le flot des paroles,

     vaine prolixité d'un monde éparpillé,

     les statues plaquées d'or, craquelées d'impatience,

     quittent leurs niches de papier mâché.

 

     Et comme un mur de briques fissuré par le temps,

     nos belles constructions

     solides fondations de grandes certitudes,

     explosent en puzzles sur le sol desséché.

 

     Et le rire de notre ombre musique le silence...

            Ariaga
 

17/01/2008

Le Dieu inconnu d'Angelus Silesius

 

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                           " Le Dieu inconnu."

 

 " Ce que Dieu est, nul ne le sait. Il n'est ni lumière, ni esprit,

Ni béatitude, ni unité, ni ce qu'on nomme Déité,

Ni sagesse, ni intelligence, ni amour, ni vouloir, ni bonté,

Ni chose, ni d'ailleurs non-chose, ni essence, ni affect,

Il est ce que ni moi ni toi, ni nul être

Ne peut éprouver tant que nous ne sommes pas devenus ce qu'Il est. "

   ANGELUS SILESIUS

   Le pélerin chérubinique, p. 220 ed. du cerf.

 

15/01/2008

Les rêves de Nietzsche-Zarathoustra

   Avant de vous donner les résultats, sur le plan de la psychologie des profondeurs et de la philosophie de la nature, des longues recherches de Jung dans les ouvrages alchimiques, j'ai envie de vous parler des rêves du Zarathoustra de Nietzsche. En effet, quand Zarathoustra rêve il est certain qu'il s'agissait pour Jung d'une projection des songes de Nietzsche lui-même. Et quand on sait l'influence que Nietzsche a eu sur Jung, influence dont je vous parlerai dans quelque temps, évoquer ces rêves est aussi montrer une des racines de  la fascination de Jung pour le rêve.
   Les rêves de Zarathoustra sont racontés dans trois textes d'une grande beauté : "Le prophète" (p. 275sq), "l'heure du suprême silence" (p; 295sq), "des trois maux" (p. 369sq).  J'utilise toujours la traduction de G. Bianquis mais j'ai oui dire qu'il en existait une plus récente que j'espère bien recevoir un jour en cadeau. (discrète incitation à mes proches...). 
   L'importance que Nietzche-Zarathoustra accordait aux rêves et à leur interprétation se manifeste au moment où Zarathoustra, se réveillant d'un sommeil profond, est navré de voir son rêve "retenir en lui son sens caché" au lieu de le laisser librement prendre son essor. Il demande alors à ses amis de l'aider à en deviner le sens et c'est, très symboliquement, le "disciple qu'il aimait entre tous" qui interprète son rêve. 
   Les rêves de Zarathoustra font entendre une grande voix que j'imagine comme étant celle du Soi et cette voix énonce des phrases essentielles et prophétiques :
   "Qu'importe ta personne Zarathoustra, dis -la parole que tu portes en toi puis brise-toi"...
    "Et pour la dernière fois la voix me dit " O Zarathoustra, tes fruits sont mûrs, mais toi tu n'es pas mûr pour tes fruits."
On peut interpréter le "tu n'es pas mûr"comme une constatation du Soi . Même si tous les éléments fournis par l'inconscient sont présents et pourraient conduire le Zarathoustra Nietzsche vers un accomplissement de sa totalité conscient- inconscient, il n'est pas suffisamment "conscient" pour mener ce travail à son terme. Ceci semble assez prophétique de la folie où il devait sombrer. .  
  Dans le dernier songe, au moment de  "l'ultime rêve de l'aube", Zarathoustra sur un promontoire au delà du monde tient un balance et pèse le monde :
   Mesurable pour quiconque a le temps, pensable pour un bon penseur, accessible aux ailes vigoureuses, déchiffrable aux divins déchiffreurs d'énigmes : tel m'apparut le monde en rêve." 
Et il interprète lui même son rêve comme une acceptation du monde tel qu'il est :
   Ni assez énigmatique pour effaroucher la tendresse humaine, ni assez catégorique pour endormir la sagesse humaine - une bonne chose, une chose humaine : tel me semblait le monde ce matin, ce monde dont on dit tant de mal.
Que de Grâces j'ai rendu à mon rêve d'avant l'aurore, qui, dès l'aube ce matin, m'a permis de peser le monde ! il est venu à moi comme une bonne chose, une chose humaine, ce rêve consolateur. "
  Ce ne sont pas seulement les songes, c'est tout le Zarathoustra qui ressemble à un grand rêve éveillé ; une sorte de récit inconscient mettant en scène des archétypes universels tels ceux du Vieux Sage, du briseur d'idoles ou de l'enfant créateur.  Le Zarathoustra fut une sorte de boîte de Pandore contenant tous les éléments propres à susciter l'enthousiasme ou la défiance d'un Jung dont je vous raconterai la fascination répulsion envers une oeuvre et un auteur qui l'accompagnèrent pendant tout son cheminement.
   Pour finir, je vais vous proposer un rêve de Nietzsche lui même, cité par Jung dans Métamorphoses de l'âme et ses symboles.
Nietzsche, au cours d'un dîner de la société Bâloise était assis à côté d'une jolie dame. Il lui raconta le rêve suivant :
   "J'ai récemment rêvé que ma main qui était posée devant moi sur la table acquit soudain la transparence du verre ; je voyais nettement en elle le squelette, le tissu,le jeu des muscles. Tout à coup, j'aperçus sur elle un gros crapaud, en même temps que quelque chose d'irrésistible me poussait à avaler l'animal. Je surmontais mon atroce répulsion et je l'avalais ".
   Il paraît que la jeune femme se mit à rire et que Nietzsche en fut très attristé. Elle n'avait peut-être pas compris que son voisin de table, toujours habillé avec une parfaite correction, venait de lui ouvrir une porte sur les profondeurs de son inconscient, et l'intimité d'un secret dégoût.
  Ce songe revint souvent hanter Nietzsche et, selon Jung , le crapaud dont il avait souvent rêvé avec l'angoisse d'être forcé de l'avaler, ne put jamais, psychologiquement parlant, être dégluti par le philosophe.
  Faites de beaux rêves...
       Ariaga
 

11/01/2008

La différence

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Vous avez peur de lui comme on a peur de l'Autre

qui ne ressemble pas au modèle déposé,

rassurante copie d'un humain bien fini.  

 

Il murmure des sons vieux de millions d'années,

avant que l'homme ne se pare des oripeaux de la pensée, 

et tremble sur ses cils, amère et apaisante,

une larme d'enfant beaucoup trop grand.

Sa salive le mouille désaltérant la pierre,

il consoles bêtes et rit d'amour ravi

quand la fleur lui sourit.

 

Dans une maison sans clef ni porte, plus vaste que les mondes,

il lit des livres jamais écrits.

Quand il a faim, il mange les couleurs,

quand il a soif, il boit la lumière,

il ne possède rien  et ne sais où il va.

Simplement il est là, regardant fixement

les vrais visages nus sous les maquillages.

Imbécile divin qui ne sait pas la mort , invention des humains,

il aspire la vie et tète l'univers.

 

Vous avez peur de lui comme on a peur du vide

mais surtout pas de cage, vous le ferriez mourir

emportant avec lui son grand secret... 

       Ariaga
 

 

09/01/2008

C. G. Jung reçoit l'enseignement des rêves

( Suite de la note précédente )
   Comme pour tous les choix essentiels de son existence, Jung reçut des rêves un enseignement l'incitant à s'intéresser à l'alchimie. Il ne les comprit pas plus, à l'époque où ils survinrent, qu'il ne comprit la connotation alchimique du Faust de Goethe.
   Rappelons, dans son enfance, la vision de la cathédrale de Bâle, à partir de laquelle se posera pour lui le problème de l'homme chrétien et de l'ambiguïté divine, problèmes latents dans les écrits alchimiques. D'autres rêves survinrent à l'âge adulte. Il en fait le récit, ainsi que leurs conséquences dans Ma vie. Il s'agit de rêves montrant, de manière récurrente, une aile de sa maison ou une construction ajoutée, n'existant pas dans la vie réelle. Il finit, à un moment de cette suite de rêves, par pénétrer dans l'aile inconnue. Il y découvre une merveilleuse bibliothèque dont les ouvrages proviennent du XVI° et du XVII° siècle. Ils contiennent des "symboles singuliers", qu'il n'identifiera que tardivement comme des symboles alchimiques. 
   Le rêve décisif se situe en 1926 (il avait 51 ans). Il est long et j'en ai seulement retenu qu'il se situe dans une vaste demeure seigneuriale aux nombreuses dépendances. Alors qu'il se trouve dans la cour les portails se ferment. Le paysan qui l'accompagne et lui sert de cocher s'écrie  (ma vie p. 237):
" Nous voila maintenant prisonniers du XVII° siècle ! -Résigné je pense : Oui, c'est bien ça ! mais que faire ? Nous voilà prisonniers pour des années ! " Puis il me vient à l'esprit la pensée consolante : un jour, dans des années, je pourrai ressortir."
   Son désir d'interpréter ce rêve l'incite à effectuer des recherches. Il explore de nombreux domaines de la tradition symbolique mais le véritable déclic n'a lieu qu'en 1928 au moment où Richard Wilhelm lui envoie un texte de l'alchimie chinoise : Le secret de la fleur d'or. C'est alors que naît en lui le désir de connaître les alchimistes.  
   Jung commande et reçoit une volumineuse collection de traités en latin. Il se contente, pendant un certain temps, de les garder dans un placard d'où il les sort périodiquement pour les feuilleter, tout en s'exclamant sur leur obscurité et leur stupidité. Mais Jung est un acharné et, petit à petit, des lambeaux de sens émergent de cette "éclatante absurdité". Lentement des connexions se mettent en place, et il découvre qu'il s'agit de symboles. 
   Il se retrouve maintenant en pays de connaissance, lit avec acharnement, jusqu'au moment où lui revient en mémoire le rêve de son emprisonnement au XVII° siècle. Une fois de plus le discours onirique lui a indiqué le chemin à suivre . Il comprend, à ce moment là, que sa voie, pour les années à venir, est d'étudier l'alchimie depuis ses débuts et d'y chercher un fil conducteur en utilisant les mêmes méthodes que celles d'un philologue étudiant une langue inconnue. Il étudie alors la relation entre les symboles et la syntaxe , fait des dictionnaires de mots et de citations. Avec le temps il réunit des milliers de références et de comparaisons. Des volumes et des volumes, représentant un véritable travail de bénédictin.
   Il faudra à Jung plus de dix ans pour que les résultats de ses études sur la symbolique alchimique, et ses possibilités d'utilisation pour l'interprétation des manifestations de l'inconscient, prennent une forme théorique satisfaisante à ses yeux. C'est alors qu'il écrira ses ouvres les plus remarquables. Ceci exprime ma pensée car une grande partie de jungiens purs et durs préfère ignorer la partie alchimique de l'oeuvre de Jung, comme s'il s'agissait d'une aventure poético-mystique un peu fumeuse.
Une fois de plus, après sa dangereuse plongée dans l'inconscient, Jung était sorti d'un labyrinthe : celui bien tortueux et obscur de l'expression symbolique de la pensée alchimique.
(à suivre)
       Ariaga.
 
  
 

07/01/2008

C. G. Jung et le Faust de Goethe

   En ce début d'année je vais commencer un "feuilleton" alchimico-philosophique traitant de la relation de Jung avec la symbolique alchimique. J'aimerais que ceux qui ont un peu de courage aillent lire une introduction à ce sujet que j'avais écrite en Novembre 2006 : C.G.Jung et la chaîne d'or.(Cliquer sur le lien).

   La relation, consciente, de Jung à l'alchimie s'est faite d'une manière tardive. C'est , une fois de plus dans Ma vie, qu'il a décrit son cheminement vers ce qu'il considère comme le "pendant historique" de la psychologie des profondeurs. Je pense cependant que, comme pour sa relation avec Nietzche (un autre feuilleton prévu pour cette année 2008), ce lien avec l'univers des alchimistes existait d'une manière latente, bien avant les années trente, années où il commença un long travail de déchiffrage du sens des textes alchimiques qui le "tint en haleine plus de dix ans".

   La relation, indirecte, de Jung à l'alchimie, commence dès l'âge de seize ans à un moment de crise existentielle et spirituelle, quand sa mère, une personne très particulière, un peu effrayante, lui dit subitement cette simple phrase : "il faut que tu lises le Faust de Goethe". Cette lecture fut pour lui un moment miraculeux, un baume sur ses blessures d'adolescent tourmenté. Il trouvait là un homme qui prenait le diable au sérieux et qui voyait la puissance du mal qui enserrait le monde. Cela le changeait de son milieu de pasteurs où l'on ne parlait que du "bon "dieu. Le Faust faisait aussi allusion au grand mystère des Mères qui tourmentait beaucoup le jeune garçon. Le récit de la grande initiation finale demeura pour lui, à la limite de sa conscience, un événement merveilleux et mystérieux. Cette porte ouverte par Goethe le resta définitivement, contrairement à celle que Jung crut avoir claquée, vigoureusement et pour longtemps, sur l'angoissant Zarathoustra de Nierzsche. 

   Il ne se rendit pas compte, à cette époque, du côté alchimique d'une oeuvre au sujet de laquelle il écit dans une lettre de 1955, vers la fin de sa vie (Correspondance, T.IV, p. 65) :

    " La seconde partie du Faust m'a accompagné tout au long de mon existence, mais il y a seulement vingt ans que j'ai commencé à y voir un peu plus clair, surtout par la lecture des Noces Chymiques, livre que Goethe avait certes lu mais qu'il n'a pas mentionné - détail intéressant - parmi les ouvrages d'alchimie qu'il avait découvert pendant son séjour à Leipzig.  ...  il est vrai que goethe n'a à notre connaissance, utilisé qu'une littérature alchimique relativement tardive, et il m'a fallu étudier les ouvrages de l'Antiquité et du haut Moyen Âge pour me convaincre que le Faust dans ses deux partie, représentait un opus alchymicum dans le meilleur des termes.  "

   Il pense que le Faust est entièrement imprégné du mystère de la conjunctio, c'est à dire de la noce chymique. Ce ne sont d'ailleurs pas, à son avis, les ouvrages lus, oubliés ou non par goethe, qui ont fourni au Faust cet  arrière plan alchimique, mais des émergences du courant souterrain perdurant depuis Hermes Trismegiste, sous la forme de la chaîne d'or. Ces racines profondes lui semblent expliquer l'" effet de numinosité " produit par le Faust.  Le jeune Jung fut certainement sensible à cet effet de numinosité ; un lien intérieur fort, longtemps invisible, s'établit ainsi entre Jung et l'alchimie par l'intermédiaire d'un Goethe sont le Faust a été l'opus magnum, le grand oeuvre. 

(à suivre)

       Ariaga.
 

  
 

04/01/2008

Prière au Dieu de mon coeur

 

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   Avant de vous parler à nouveau de Philosophie de la Nature, d'Alchimie Spirituelle, de la Psychologie des profondeurs de C.G.Jung et aussi de l'Amour qui est pour moi le noyau central à partir duquel s'effectue tout le cheminement vers le Soi, je voulais vous proposer une simple prière.

   Je ne pratique aucune religion, si ce n'est celle d'un immense respect pour le forces de la Nature et du Cosmique, tout en acceptant les croyances sincères et les vraies beautés de chacune. Cependant, j'aime me réciter au réveil, en tentant de me pénétrer de chaque mot, une petite prière reflétant l'humilité, l'amour de Dieu et du prochain de Saint François d'Assise.

   Au début de cette nouvelle année, que j'espère nourrie d'une spiritualité sans dogme, voici ce que j'ai butiné pour les visiteurs du Laboratoire. Ariaga.

 

          Dieu de mon coeur

Dans le le silence de ce jour naissant,

Je viens te demander la paix, la sagesse, la force.

Je veux regarder aujourd'hui le monde

Avec des yeux tout remplis d'amour

Être patient, compréhensif, doux et sage, 

Voir au delà des apparences

Tes enfants comme tu les vois Toi-même,

Et ainsi ne voir que le bien en chacun. 

Ferme mes oreilles à toute calomnie,

Garde ma langue de toute malveillance,

Que seules les pensées qui bénissent 

Demeurent en mon esprit,

Que je sois si bienveillant et si joyeux

Que tous ceux qui m'approchent sentent Ta présence.

Revêts-moi de Ta beauté Seigneur,

Et qu'au long de ce jour je Te révèle. 

     Attrribuée à  Saint François d'Assise