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03/05/2007

Hymne à l'esprit de la Nature

   Tous les alchimistes d'orientation philosophique ont louée et magnifiée la Nature, parfois avec un sentiment de crainte devant ses forces obscures. Mais, ils ne pouvaient que la considérer avec respect car elle était, pour eux, toute imprégnée d'une essence divine, cet or qu'ils espéraient trouver par d'incessantes distillations. En attendant ils éprouvaient envers les deux natures, la matérielle et la divine, un sentiment "religieux" et leur but n'était pas de les séparer mais de réunir ce qui était en haut à ce qui était en bas, selon le principe de similitude de la Table d'Emeraude : "Ce qui est en bas est comme ce qui est en haut, ce qui est en haut est comme ce qui est en bas, à la fin de réaliser le miracle de la chose unique...". Ce sentiment religieux de la Nature existait depuis l'antiquité, et selon Jung, (Dans Synchronicité et Paracelsica) son expression la plus belle se trouve au milieu d'un fatras de recettes magiques dans l'épigraphe secret du  Grand Papyrus magique de Paris. (Ne me demandez pas l'origine exacte je l'ignore et tout renseignement sera le bienvenu). Moi aussi je trouve ce texte magnifique et je veux le partager avec vous. 

          Salut à toi, édifice entier du souffle et de l'air ; salut ! esprit, qui du ciel se répand sur la terre, et de la terre qui occupe l'espace médian de l'univers, s'étend jusqu'aux limites de l'abîme sans fond. Salut ! esprit qui pénètre en moi, qui adhère à moi et qui me quitte conformément à la volonté de Dieu dans sa bonté. Salut, commencement et fin de la nature immuable. Salut ! infatigable rotation des éléments. Salut ! serviteur de la lumière du soleil, lumière de l'univers. Salut ! cercle de la lune qui brille d'une lumière inégale et éclaire la nuit. Salut ! tous les souffles des esprits aériens. Salut à vous à qui est accordée la joie dans la louange, frères et soeurs, consacrés et consacrées.  O grand édifice de l'univers, fermé sur lui-même, incompréhensible. Céleste habitant du ciel, subtil habitant de l'éther, de la nature de l'eau, de la terre, du feu, du vent, de la lumière, de l'obscurité, éclatant comme les astres, à la fois froid, humide et igné. Je te loue, ô Dieu des Dieux, ordonnateur du monde, conservateur de l'abîme sur le siège invisible de son assise. Esprit qui a séparé le ciel de la terre, a couvert le ciel de voiles d'or éternels et a fixé la terre sur des bases éternelles, qui a suspendu l'éther au plus haut des airs, qui a dispersé l'air en souffles qui se meuvent d'eux-mêmes, qui a disposé l'eau tout autour, qui dirige les ouragans, qui est tonnerre, éclair, pluie, qui ébranle, qui engendre la vie, Dieu des Eons, tu existes dans ta grandeur, souverain, divin maître de toutes choses.

   J'aurais aimé, avec des frères et des soeurs louangeurs consacrés, écouter ce texte offert, d'une voix forte, au Dieu de la Nature, mais c'était il y a bien longtemps et si j'y étais je l'ai oublié. Et pourtant...il y a des échos qui résonnent en moi. 

     Ariaga
 

11/04/2007

La langue des oiseaux

En hommage au Coran teint d'Etienne PERROT

La "langue des oiseaux", au sens alchimique, et comme expression onirique, est une manière de regarder, et surtout d'écouter, les mots autrement que dans leur sens logique. Pour les alchimistes elle avait comme synonyme la "cabale phonétique", c'est à dire une transmission par le son, non conceptuelle, comme celle des oiseaux.Cette transmission n'est pas seulement perçue par l'oreille mais par le coeur et elle est du domaine de l'inspiration.

Cette langue des oiseaux nous rappelle que l'alchimie, qui se faisait parfois appeler "art de musique", attache une grande importance à la musique. Témoin, Michel Maïer, joignant des fugues, dont il donne la notation, à chacun des emblèmes et discours de son Atalante Fugitive. L'iconographie alchimique, quand elle représente le laboratoire de l'alchimiste, montre souvent des instruments de musique exprimant l'harmonie et la musique céleste accompagnant l'aboutissement du Grand Oeuvre. 

La langue des oiseaux fait éclater, parfois comiquement, le mot. Perrot nous dit que le mot se "dilate" et "éclate de rire. On le ressent, on l'entend alors d'une manière euphonique qui lui donne un autre sens que celui qu'il semble avoir dans la phrase. C'est ainsi, en particulier pour les rêves, qu'une nouvelle signification émerge des profondeurs de l'inconscient en passant la barrière du langage qui est le code indispensable à la compréhension du rêve. En utilisant cette langue des oiseaux, certains rêves "absurdes" trouvent leur sens profond. Par exemple, si vous avez dans un rêve une curieuse tomate qui n'a rien à y faire mais que "la tomate" vous gazouille à l'oreille "l'automate", vous partirez peut-être sur une autre piste pour interpréter votre rêve. 

Certains poètes, les surréalistes par exemple qui écoutent une mystérieuse voix qu'ils appellent l'inspiration, paraissent parfois aligner des mots insnsés. Ils chantent, eux aussi surpris par les mots qui coulent de leur  plume, la langue des oiseaux. Lisez les à haute voix, jouez avec leurs mots et vous les entendrez autrement. Mais il est vrai que le Poète est alchimiste. La boucle est bouclée. ( clé ).

27/03/2007

Alchimie et cuisine

L'illustration de l'emblème XXII de l'Atalante fugitive, un ouvrage alchimique de Michel Maïer,1617, ( traduit par E. Perrot, ed. Dervy) montre, dans une cuisine, une femme enceinte devant un feu de bois au dessus duquel est suspendu un grand chaudron. Elle s'apprête à cuire des poissons. Bien d'autres éléments de l'illustration sont fort intéressants (il y a même un chat), mais cette description simplifiée suffit à illustrer le thème de la cuisine qui est très présent dans toute la littérature alchimique. 

Michel Maïer, au cours du commentaire, explique, avec un soupçon d'excuse, qu'il n'y a pas de véritable différence entre la cuisson "philosophique" et la cuisson "vulgaire ". Je cite (p. 189) :

"Car de même que la femme amène à maturité des poissons dans l'eau, c'est à dire résout en air et en eau toute leur humidité superflue, les fait bouillir et cuire, le philosophe agit pareillement avec son sujet. Il le fait macérer dans sa propre eau, qui est plus forte que le vinaigre le plus aigre, le liquéfie avec elle, le dissout, le coagule, le fixe dans le vase d'Hermès dont les jointures sont très rigoureusement fermées, comme il convient, de peur que l'eau ne s'exhale et que le contenu du vase ne soit brulé." 

Les degrés de la cuisson sont essentiels pour les alchimistes. Les conseils sur la force ou la douceur des cuissons, la composition et la quantité des ingrédients, ont des allures de recettes de cuisine, sans cesse recommencées et améliorées. Maïer lui même, après avoir expliqué l'impossibilité de réaliser quelque partie de l'Oeuvre que ce soit sans avoir trouvé le bon régime du feu, avoue, ce que je crois volontiers, n'avoir "découvert la vérité" qu'au "prix d'un labeur incroyable et non sans y avoir consacré un grand nombre d'années ..." 

Le vocabulaire culinaire de l'alchimie est très riche et souvent encore d'actualité. On observe quatre régimes, ou degrés de chaleur, du feu : lent et doux, modéré et tempéré, grand et fort, brûlant et tempétueux. Et encore : vaporeux, nourrissant, sec, humide, sublimant, feu de bain, feu de cendres, feu de charbon, feu de flammes. Qu'est-ce qui cuisait sur ces feux dans les "vases" de l'alchimiste ? Souvent des produits peu ragoûtants que je préfère vous laisser imaginer...

Les processus alchimique sont, aussi, symboliquement comparés à une oeuvre culinaire "de femme". Cela est illustré chez Maïer par la femme enceinte. Il y a là une allusion à la grossesse durant laquelle l'enfant est lentement mijoté dans la chaleur du ventre maternel.  La cuisson "oeuvre de femmes" est aussi un passage du cru au cuit, c'est à dire une transmutation.

Si on passe au domaine de la vie pratique, ce que j'appelle l'alchimie quotidienne, la cuisine est destinée (en principe !) à la réussite des mets. Or, qu'est-ce qu'un plat réussi ? C'est, non seulement un plat bien cuit, mais aussi un plat où sont respectées les justes proportions entre les différents éléments, c'est à dire l'harmonie. Que cherchaient les alchimistes Philosophes de la Nature ? A retrouver l'harmonie divine perdue dans la matière. Quelle est la quête de quelques cuisiniers exceptionnels ?  Méditer sur l'harmonie des saveurs et tenter de recréer cette harmonie à partie des matériaux que leur offre la nature. On peut alors les qualifier d'"artistes" comme se nommaient entre eux les alchimistes dont l'Oeuvre n'avait pas pour but de fabriquer de "l'or vulgaire", mais l'Or spirituel. 

             

 

21/03/2007

Rêve et alchimie

J'ai envie, aujourd'hui, de vous parler de la permanence de certains symboles, représentations archétypiques fortes, qui éclairent à la fois l'univers de l'alchimie et celui des rêves.  Bien sûr, on ne peut pas "prouver" ce genre de chose. C. G. Jung l'a tenté dans son analyse des rêves d'un scientifique contemporain (cf. Psychologie et alchimie) mais on ne peut que proposer. De plus, cela implique l'existence d'un fonds commun (l'inconscient collectif) à partir duquel des représentations propres aux alchimistes perdureraient dans les rêves d'aujourd'hui. Ceux qui me lisent savent que cette théorie me séduit et que je pense que l'inconscient collectif ne connaît ni le temps ni l'espace.

Alors que sont les manifestations de cette résurgence, issue du courant souterrain de l'alchimie et de toute la philosophie de la Nature pré-chrétienne ? Les représentations oniriques utilisent le plus souvent pour leur mise en scène des décors et des évènements en relation avec les quatre éléments naturels que sont l'eau, la terre le feu et l'air. A ces éléments il faut ajouter la sexualité, si bien cernée par S. Freud. On navigue sur l'eau, on vole dans les airs, on explore les profondeurs souterraines, on se chauffe devant un feu, on cuit un aliment, on a des relations charnelles.  On peut aussi subir les rigueurs du froid, du vent, de la chaleur. La base du matériau onirique n'est pas l'intellect mais plutôt un mélange d'émotions et de représentations, plus ou moins symboliques, du monde sensible. Cet assemblage, même s'il est surprenant, voire burlesque, demeure compréhensible pour le rêveur puisqu'il est capable de le raconter et que des scénarios, issus de la vie quotidienne lui donnent un semblant de sens.

Vous me direz, pourquoi parler d'alchimie ? Parce que le symbole, vivant, transformé, de la plupart de ces thèmes, et de beaucoup d'autres, se trouve déjà dans les textes et les représentations iconographiques des alchimistes. L'oiseau devient avion, les roues sont celles d'un véhicule à moteur, on monte et on descend en ascenseur , l'athanor se transforme en four à micro-ondes, mais la tonalité alchimique est là.

Quand Profdisaster, dans un "grand rêve"numineux  entend une voix dire  "c'est celui là qui déposa un oeuf dans ta bouche", cet oeuf, si on l'interprète à la lumière des écrits et de l'iconographie des alchimistes du Moyen- Âge, il en a du sens !  Et je crois, qu'à l'ombre de l'alchimie, on peut faire du chemin vers la compréhension des rêves et de soi-même.

 

 

17/03/2007

Le secret d'amour

   Le livre le plus original, personnel, d'Etienne PERROT s'intitule Coran teint, sous titré le livre rouge, (Ed. La Fontaine de Pierre). C'est un ouvrage auquel s'appliquent de nombreux qualificatifs : alchimique, prophétique,  onirique, symbolique, poétique. L'auteur l'a divisé en vingt-cinq "sourates"destinées à emmener le lecteur, par un chemin proche du surréalisme, vers une transmutation poétique au sens originel du terme : celle des "artistes" alchimistes grecs qui se donnaient le nom de poïêtai, c'est à dire poètes. Le titre Coran, veut dire "prédication". La teinture est la teinture alchimique. Mais Perrot, adepte de "la langue des oiseaux" chère aux alchimistes, fait aussi dans ce titre allusion à l'évêque semi -légendaire Corentin ami du roi d'Ys, la cité engloutie de Cornouaille, ceci parce que Perrot était d'Audierne dans le Finistère. Je vous ai choisi, difficilement car il y en a tellement qui me plaisent, un extrait qui parle de l'Amour, un sujet  qui m'est cher, comme ceux qui me suivent ont du s'en rendre compte. 

        "Quel est le secret de Jung ? C'est le secret d'amour, pratiquement baptisé par lui "transfert", dont il a publié les images puissantes gravées par un alchimiste du XV° siècle et incluses dans Le Rosaire des Philosophes. Elles peignent les phases de l'union de l'homme et de la femme, des deux parties de l'être, les approches, le dépouillement des vêtements, l'entrée dans le bain de la transformation, l'union nuptiale, la mort qui s'ensuit, la naissance de l'androgyne et, pour finir, les symboles de l'accomplissement : la reine, le roi, la résurrection du Christ et le couronnement de Marie - la matière : mater-materia - par la Sainte Trinité. Ces noces transformantes sont le coeur du dialogue alchimique restauré par Jung, mais, mystérieuses et secrètes par essence, elles demeurent ignorées de la plupart au profit d'aspects plus voyants de l'oeuvre intérieure, et surtout plus descriptibles par la raison. Mais comment cette oeuvre pourra-t-elle aboutir sans l'agent qui, seul, opère la transformation : le feu secret des alchimistes, feu qui est l'amour éclairé, ou, ce qui revient au même, la conscience empreinte d'amour ? Les images intérieures défileront alors en une ronde sans fin, sans conduire l'être vers son centre, siège de l'amour qui l'attire, aimant des sages. "

Etienne PERROT, Coran teint, p. 52.  

20/02/2007

La maladie, C.G.Jung et l'alchimie

La maladie peut être un refuge qui permet d'échapper à l'ennuyeuse quotidienneté de l'existence ou d'excuser des manques, de permettre des ruptures. Elle est aussi une sorte d'issue à l'exaltation où s'épuisent les forces créatrices, les dépenses d'énergie excessives. Il y a des êtres pour lesquels la recherche du sens, et du dire de ce sens, est une mise à l'épreuve de la chair. Je pense à Nietzsche qui disait bénéficier de moments de grande clarté aux instants où il souffrait le plus. Chez ceux là, c'est au cours d'une douloureuse "passion"que, comme dans le creuset des alchimistes, se produit la "cuisson lente" de l'Oeuvre. C.G.Jung appartenait à l'espèce de ceux qui "somatisent" et que la maladie "transmute".

Pendant la petite enfance, une longue "absence de sa mère : eczéma généralisé, culbute du haut d'un escalier, heurt violent contre le bord d'un poêle, angoisses nocturnes. A douze ans, il fait, ce qu'il appelle lui même dans Ma vie, une névrose. Renversé par un camarade, sa tête heurte le trottoir. Il anticipe la violence du choc et une pensée fulgure : maintenant tu ne seras plus obligé d'aller à l'école! Cette pensée est tombée dans l'inconscient mais une somatisation s'est produite : chaque fois qu'il doit travailler ou aller en classe il tombe en syncope. Suit une période heureuse pendant laquelle il est libre de faire tout ce qui lui plait. C'est en particulier à cette époque que sa communion avec la Nature et l'originalité de sa réflexion se développent de manière très puissante. Il faut une réflexion de son père, entendue par hasard, sur la lourde charge que va représenter pour un pasteur sans fortune un enfant handicapé, pour le tirer de cet état. Les crises disparaissent et il se rend compte que c'était lui qui avait "monté cette honteuse histoire". 

Ce comportement de fuite devant la vie ordinaire, cette manière de chercher refuge dans la maladie, se manifeste au moment de sa grande maladie de 1944 où, après une période de visions dans un état entre la vie et la mort, il met trois semaines avant de se "décider à revivre". Et pourtant, l'instinct de vie, la nécessité de transmettre une expérience, l'impression qu'il est important d'accepter son destin et la Vie telle qu'elle est l'emportent. C'est après cette cuisson lente sur l'athanor d'une transformation qui le mène aux portes de la mort que son travail et sa pensée se révélèrent les plus fertiles. Il a parlé ensuite de la possibilité d'une "zone intermédiaire" entre le physique et le psychologique, la maladie étant semblable à la pierre des alchimistes. Elle serait alors une étape dans le processus d'individuation c'est à dire de l'Oeuvre que nous devons entreprendre sur nous- mêmes pour devenir un être complet.

J'ai pris Jung comme exemple parce qu'il est représentatif et que d'autres que je connais auraient été trop personnels, mais je pense qu'il existe des lecteurs de ce blog qui, après avoir subi une maladie longue et douloureuse qui les a fait frôler la mort, ont été transformés par cette épreuve. Le plaqué or de leur vie s'est transformé en or. Je pense, entre autres conséquences, que les états valétudinaires, probablement parce qu'ils diminuent les défenses du  conscient, relativisent l'importance de problèmes souvent liés à l'image que l'on souhaite présenter à la"Société"et permettent de se consacrer à l'essentiel, la Vie et la spiritualité. 

 

08/02/2007

Le sang de l'alchimie, c'est l'amour

"L'alchimie, la voie intérieure, est aux antipodes de toute technique, de toute conceptualisation, puisqu'elle est la vie dans son jaillissement. Elle est la sagesse des fous, la sagesse des enfants qui puisent leur savoir dans l'eau qui coule, le vent qui berce les branches en faisant bruisser et trembler les feuilles, le feu qui pétille et multiplie les nuances de ses ors. L'ordre profond, l'ordre de l'univers n'apparaît que si l'on épouse amoureusement le désordre des phénomènes, la naïveté éloquente des formes intérieures et extérieures, sans intrusion illégitime de la raison qui classe, systématise et veut tout régenter. Le monde, certes, est un système, c'est à dire un ensemble dont toutes les parties se tiennent, il est le Vivant parfait dont parle le Timée. Pourtant, ses membres ne sont pas reliés par la lumière glacée de l'intellect coupé de ses racines, ils ont pour lien, pour sang, - pour colle, disent les alchimistes - la clarté rougeoyante et chaude de l'amour."

    Etienne PERROT

LA VOIE DE LA TRANSFORMATION

Editions  la Fontaine de Pierre, p. 337

07/02/2007

Méditation et imagination en alchimie

Quand je parle d'alchimie sur ce blog je fais référence, pour l'instant, aux philosophes alchimistes de la nature" du Moyen Äge. Les racines sont beaucoup plus anciennes, grecques arabes, chinoises, etc. La constance des alchimistes envers une recherche assez désespérante quant aux résultats, peut s'expliquer par leur "attitude mentale" à l'égard de l'Oeuvre.  S'appuyant sur les textes d'un auteur du Moyen Äge, où il est écrit que l'Oeuvre doit être accomplie "avec l'imagination vraie et non avec celle qui est chimérique", C.G.Jung parvient à l'hypothèse suivante : "il semble très possible que l'auteur soit en fait de l'avis que le secret essentiel de l'art est caché dans l'esprit humain ou, pour l'exprimer en termes modernes, dans L'inconscient. Ce serait pour cette raison que l'homme ignorant ne peut accomplir l'Oeuvre sans avoir étudié les anciens philosophes, prié Dieu, et s'être mis dans une certaine condition mentale. 

La méditation, le premier des exercices propres à aider l'alchimiste à s'élever à la hauteur de sa tâche, est considérée par les alchimistes comme un "colloque intérieur" avec un invisible "autre" qui peut être, par exemple, soit Dieu, soit un autre "soi même", soir un ange gardien.  Ce colloque intérieur, dépassant le stade d'une simple réflexion, est un rapport avec l'autre en nous, assimilée par Jung à un dialogue avec l'inconscient.  Il s'agit d'une "relation dialectique vivante", comparable à celle de la psychologie des profondeurs.

L'imagination , n'est pas une vague rêverie ou une idée qui nous vient à l'esprit, au sens de pensée sans substance, c'est une représentation voulue, certains diront "pensée dirigée". Comme beaucoup de concepts alchimiques cette imagination est mise en relation avec l'âme et Dieu. Quand les auteurs parlent de la faculté imaginative de l'âme, il faut se représenter une sorte de délégation de pouvoirs à partir du divin. En simplifiant : l'âme est le "vicaire de Dieu et, dans cette fonction, elle gouverne la pensée ; pensée qui gouverne le corps en devenant une "âme corporelle résidant dans le sang". L'imagination serait donc un phénomène à la fois spirituel et physique, ce qui pourrait expliquer son influence sur les transformations de la matière. La faculté imaginative de l'âme de l'alchimiste lui permettait ainsi d'entretenir un rapport avec la matière qu'il espérait transmuter.

Le domaine intermédiaire entre la matière et la psyché était, pour les alchimistes, celui des corps subtils. Le corps subtil était considéré par ces alchimistes, utilisant à la fois la symbolique alchimique et des conceptions religieuses, comme une véritable réplique et Modèle de la vraie Pierre spirituelle et céleste : Jésus Christ. Le projet de l'alchimiste étant de produire le "corps transfiguré de la résurrection".

L'imagination était donc liée, en remontant la chaîne de la délégation de pouvoirs, à l'imagination de Dieu. Cela permettait à l'"artiste" de saisir et de se représenter "le plus grand" qui avait alors la possibilité de passer d'un état potentiel à la réalité substantielle. Avec l'aide de Dieu, formule fréquente en alchimie, "tu peux concevoir le plus grand", ton corps peut le réaliser, était-il enseigné à l'adepte.

Ce que l'imagination tente de faire accéder à la représentation, ce plus grand, c'est, pour la psychologie des profondeurs de Jung, l'émergence de représentations symboliques des contenus archétypiques de l'inconscient. 

 

02/02/2007

Obscurité et poésie chez les alchimistes

Les alchimistes ont des difficultés à se comprendre entre eux. Ils admettent écrire d'une façon obscure mais sans imaginer qu'il puisse exister une possibilité d'écrire différemment. Ils utilisent des concepts fondamentaux et les habillent ensuite d'analogies et de symboles appartenant à chacun d'eux. L'explication de C.G. Jung est la suivante:

"La méthode de l'alchimie, psychologiquement parlant, est celle de l'amplification illimitée. L'amplificatio convient toujours lorsqu'on à affaire à une expérience obscure, qui est si vaguement ébauchée qu'elle doit être amplifiée et élargie, en étant placée dans un contexte psychologique, afin d'être comprise."

Nous verrons que la même méthode est applicable à l'interprétation des rêves.

Pourquoi une telle variété de symboles désignant les processus ou agents ou aboutissements de la transformation alchimique ? Cela découle à la fois de la nécessité du secret et aussi de l'interchangeabilité de matériaux de l'Oeuvre qui sont censés être tout d'abord antagonistes. Par exemple l'eau et le feu, une paire d'opposés typiques, sont, si on en croit les auteurs "un et un seul". 

Le lecteur d'ouvrages alchimiques se trouve donc devant des noms de substances signifiant à peu près n'importe quoi. En outre, plus une substance est utilisée, ou importante, plus est grande la multiplicité des noms et des allusions symboliques servant à la désigner. On comprend la perplexité de Jung, pendant les dix ans (quelle obstination ! ) où il fut en contact avec la littérature alchimiste, y cherchant une réponse, mais sans rien y comprendre par excès de logique. Il aurait du faire jouer plus tôt une des multiple facettes de sa personnalité, son côté poète refoulé. En effet, pour moi, l'alchimie, s'apparente à la poésie la plus fantasque. Elle va chercher son énorme vocabulaire dans tous les domaines : teinturiers, vins et liqueurs, métaux, la nature, les animaux, l'amour physique et spirituel et bien d'autres encore. On se demande, en lisant certains textes, s'ils n'ont pas été écrits par des surréalistes. 

Je vais vous citer une toute petite partie des noms donnés à la Pierre des alchimistes par les auteurs. Je suis certaine que certains des talentueux poètes qui fréquentent ce blog seraient capables d'en faire une délirante poésie :

Pierre et non pierre - Etoile - Pierre de Paradis - pierre animale - Sanguinaire - Solaire - Eau courante - Eau éternelle - feu ardent - terre morte - le fugitif - le généreux - l'objet précieux - l'infamie avilie - la gloire dominante - la pierre tendre - merveilleuse - Philosophale - sacrée - secrète - le Sauveur. .........et j'en passe.

 

 

19/01/2007

Le matériau de l'alchimiste et l'ombre

La première rencontre de l'alchimiste philosophe avec le matériau de son oeuvre est douloureuse et déstabilisante. Elle peut être comparée à la rencontre avec l'ombre au début d'un travail d'analyse junguienne. (pour les courageux, relisez ma note du 05/12/06à Jung..."l'ombre éclairée par C.G.Jung.)

Pour pratiquer l'art royal, il faut être prudent et ne pas craindre de se salir, que ce soient les mains ou l'âme. En effet, les traités transmis entre les initiés disent que la matière première des transmutations sera trouvée dans l'ordure. Entre autres désignations peu ragoûtantes les matériaux de base peuvent être les excréments, des sécrétions diverses, l'urine, le sang menstruel et j'en passe...

L'idée de la comparaison entre le côté répugnant de la matière première symbolisée et l'ombre existait déjà dans les anciens textes. Ainsi il est écrit "il est donné au philosophe par Dieu de faire apparaître les choses cachées dans l'ombre et de les extraire de celle-ci..."(Novum lumen).

Pour C.G.Jung, ce que les alchimistes appellent "mélancolie", si bien illustrée par Dürer, pour décrire l'impression ressentie au début de l'oeuvre correspond bien à la rencontre avec l'ombre, en particulier au moment de la réflexion sur les rêves et leur interprétation. Quand on commence un travail sur soi, travail d'alchimie spirituelle, processus d'individuation, il faut accepter de reconnaître la présence et la réalité des aspects sombres de sa personnalité au lieu de les projeter sur "les Autres". Il faut aller au charbon...car, comme le disait l'alchimiste philosophe Morenius : prends ce qui est enfoncé sous tes pieds dans le tas de fumier, sinon tu tomberas sur la tête en voulant monter sans marches". J'aime beaucoup cette ancienne formulation d'un problème très contemporain.

15/01/2007

Alchimie : un dictionnaire

Le dictionnaire Mytho-hermétique de Dom Antoine-Joseph Pernety est un outil précieux pour celui (ou celle !) qui cherche à trouver son chemin dans la forêt de la symbolique alchimique. Rédigé en français, publié en 1758, oeuvre d'un religieux bénédictin, il en existe un fac similé aux éditions Arché.

Ce moine, très chrétien, fait preuve d'une largesse d'idées étonnante, en particulier dans sa manière, tout en s'abritant derrière des auteurs, de diviniser la Nature. Il utilise, en effet, pour ses définitions des extraits "choisis" des auteurs les plus réputés et, même s'il ne le cite pas très souvent, on devine l'influence de Paracelse. Il propose ainsi un vaste panorama de la philosophie hermétique à l'époque de son travail. Il justifie ses recherches, sur le plan religieux, en écrivant dans dans sa préface:

"Cette Science est un don de Dieu, et un mystère caché dans les livres des philosophes, sous le voile obscur des énigmes, des métaphores, des paraboles et des discours enveloppés, afin qu'elle ne vienne pas à la connaissance des insensés qui en abuseraient et des ignorants qui ne se donnent pas la peine d'étudier la Nature."

Ces gens qui refusent d'étudier la Nature sont ceux qu'il avait déjà fustigés par ces lignes qui me semblent avoir conservé toute leur actualité :

"Mal à propos traite-t-on de fous les Philosophes Hermétiques : n'est-ce pas se donner un vrai ridicule que de décider hardiment que l'objet de leur Science est une chimère, parce qu'on ne peut pas le pénétrer, ou qu'on l'ignore absolument , C'est en juger comme un aveugle des couleurs. "

Je pense que cette citation de Pernety devrait être méditée de nos jours.

Pernety fait le choix de multiplier les exemples, au risque d'être touffu, pour donner au lecteur la possibilité de se faire une idée au sujet des "obscurités" qui peuvent être à l'origine d'erreurs, mais aussi de découvertes "extraordinaires". C'était un homme qui ne craignait pas de prendre des risques, on le voit dans les dernières lignes de la préface :

"Il me semble que plus un homme a d'étendue de génie et de connaissances moins il doit nier et plus il doit voir de possibilités dans la Nature. A être crédule il y a plus à gagner qu'à perdre. La crédulité engage un homme d'esprit dans des recherches qui le désabusent, s'il était dans l'erreur, et qui toujours l'instruisent de ce qu'il ignorait." 

Et que dire de ce qu'écrit Pernety à l'article Nature :

"L'oeil de Dieu, Dieu lui même toujours attentif à son ouvrage, est proprement la Nature-même, et les lois qu'il a posées pour sa conservation sont les causes de tout ce qui s'opère dans l'univers"

Pour Pernety, comme pour Paracelse, la Nature toute puissante est assimilable à Dieu et en retournant la proposition on peut se demander si ces philosophes, sans en être conscients, n'assimilaient pas Dieu à la Nature.

Pour ceux qui suivent ce blog depuis un moment ils comprendront que cette idée m'interpelle fort.  

10/01/2007

Etienne PERROT sur l'alchimie

"L'un des caractères de l'alchimie est d'avoir offert à l'âme occidentale corsetée dans une forme doctrinale étroite qui séparait comme par un glaive le bien et le mal, un champ, une vigne beaucoup plus vaste où elle a pu évoluer en toute liberté sans faire passer ses productions spontanées au crible d'une orthodoxie sourcilleuse. L'alchimie tient dans le monde de la chrétienté la même place que la peinture d'un Jérôme Bosh dans son univers artistique ; les thèmes hermétiques abondent d'ailleurs chez l'auteur du "jardin des délices" et de "la nef des fous". Il est significatif que la matière obscure qui doit être changée en pierre de lumière ait reçu entre autres noms celui de Satan. L'inconscient qui est la "matière prochaine"de  l'oeuvre, pour reprendre une expression alchimique, n'est-il pas encore aujourd'hui, aux yeux de beaucoup, un repaire de démons ?Ainsi l'alchimie et la psychologie complexe, l'une et l'autre servantes de l'âme profonde, partagent la vision païenne et orientale qui substitue au manichéisme pratique du christianisme opposant en une lutte éternelle Dieu et le Diable, le jeu de deux principes complémentaires, le yin et le yang chinois, l'obscurité et la clarté dont la réunion forme le Tao, la Voie juste d'où partent et où se résolvent les contraires composant l'univers de la multiplicité. J'ajoute qu'à l'intérieur même du christianisme cette conception était retrouvée en pratique par les grands mystiques, dont le but était de faire que "Dieu soit tout en tous", et qu'elle est une des causes permanentes de la suspicion dans laquelle les autorité tenaient l'expérience intérieure.

    Le stade ultime de l'homme suivant la psychologie empirique de Jung, le Soi, répond aux descriptions des hermétistes aussi bien qu'à celles de tous les grands enseignements traitant de la voie où l'homme se réalise dans sa totalité divine. L'être qui l'atteint, fluide comme l'eau par sa docilité à l'inconscient, est en même temps ferme comme la pierre, car, ne résistant à rien, rien ne peut l'entamer. C'est ce que voulait exprimer le dernier grand rêve confié par Jung. Le vieux sage y voyait une grosse pierre ronde présentée sur un socle comme un objet sacré avec cette inscription : EN SIGNE DE TA TOTALITE ET DE TON UNITE. Cette pierre ne contenait-elle pas l'alpha et l'oméga de toute sagesse ? N'était-elle pas la Pierre des anciens philosophes."

 

 Etienne PERROTLa voie de la transformation, p. 164-165

Ed. La Fontaine de Pierre.
 

08/01/2007

Alchimie : la voie humide

Au moment de sa confrontation avec l'inconscient, C. G. Jung, qui était à la fois l'opérateur et le matériau de sa propre transmutation, a failli se perdre au cours des nombreuses "distillations" qu'il a imposées à sa psyché. Mais il a aussi commencé, sans le savoir à cette époque, à explorer la voie que les alchimistes appelaient la "voie humide".

Celui qui suit la "voie humide", explique E. Perrot dans son ouvrage La voie de la transformation (p.95) observe les phases de l'Oeuvre sur les parois du vase en verre. Ou plutôt il observe leur reflet. Il s'agit d'une lente gestation, je dirais une cuisine à feu doux, durant laquelle il voit des images qu'il traduit en symboles. Un peu comme les habitants de la caverne de Platon. La "voie sèche est celle où "l'artiste est directement aux prises avec la réaction de la transmutation dans le vase". En effet : "il n'y a pas de forme dans le feu, le feu brule les formes." Un texte offrant des concordances avec ce cheminement sur la voie humide se trouve dans Ma vie de Jung :

"Dans la mesure où je parvenais à traduire en images les émotions qui m'agitaient, c'est à dire à trouver les images qui se cachaient dans mes émotions, la paix intérieure s'installait . Si j'avais laissé les choses demeurer sur le plan de l'émotion, il y a lieu de penser que j'aurais été déchiré par les contenus de l'inconscient..."

Les alchimistes éprouvaient, eux aussi, des émotions provoquées par leurs expériences. Ils opéraient avec l'espoir fou de conquérir un fabuleux trésor, mais aussi sous la pression d'une angoisse provoquée par la crainte de Dieu et du Diable car, au fond d'eux -mêmes ils savaient bien qu'ils étaient quelque peu hérétiques. Le fait de traduire leurs émotions en images et en symboles avait, comme pour Jung, une vertu thérapeutique et rassurante.  

L'impression de brouillard chimérique que donne la symbolique alchimique est due au fait que ces hommes du Moyen Age, semblables en cela à celui qui reçoit des rêves absurdes, se trouvaient devant un inconnu pour lequel il n'existait pas de représentations connues.  Ils étaient obligés de procéder par approximations, allégories, images mythologiques, espérant ainsi exprimer leurs secrets d'une manière qui les soulage, tout en ne les chargeant pas d'une culpabilité religieuse.

Entouré de ses fioles, livres et instruments, épuisé par la chaleur de l'athanor, les veilles, les méditations, intoxiqué par les vapeurs du mercure et autres produits chimiques, l'alchimiste devait souvent être submergé de visions et d'hallucinations. Il est aussi possible que certains aient absorbé certains mélanges de leur confection...

L'alchimiste vivait donc une sorte de long rêve éveillé durant lequel se produisaient des manifestations de l'inconscient collectif. Sortant ensuite de son nuage onirique, il tentait d'exprimer l'inexprimable par une symbolique infiniment complexe, tellement riche que je ne peux m'empêcher de penser, comme Jung, qu'elle "devait son existence à une raison suffisante."

 

 

 

03/01/2007

La montée des marches en alchimie

Pour ceux qui seraient tentés par l'aventure poétique, je dirais même surréaliste, que représente la lecture de certains textes alchimiques et aussi pour ceux qui voudraient suivre le cheminement de Jung dans les ouvrages où il traite de la symbolique alchimique (eh oui, il y en a, je l'ai bien fait !), il est nécessaire de connaître les sept phases du Grand Oeuvre.  Ces phases sont décrites en détail dans le "Dictionnaire mytho-hermétique" de Pernéty et très clairement résumées dans "Le symbolisme des nombres" de R. Allendy.

Les illustrations des ouvrages alchimiques représentent souvent les phases de l'Oeuvre comme une montée de marches aboutissant au couple illustrant la conjonction des éléments masculin et féminin. Voici une explication très succincte de ces mots clés :

        En premier lieu il y a la calcination , c'est à dire, au moyen du Mercure des sages chauffé "au feu philosophal", la purification des corps et leur séparation de l'Humide qui les liait.

       Suit la putréfaction, opération qui détruit la nature et la forme du corps putréfié, pour le transmuer et lui permettre de produire un corps nouveau.  

      Vient ensuite la solution, c'est à dire, selon Pernéty "la conversion de l'Humide Radical fixe en un corps aqueux par l'action de l'esprit volatil caché dans la première eau."

      La quatrième marche est celle de la distillation, opération qui "subtilise toutes les eaux et les huiles".

      Ensuite, la conjonction pendant laquelle il y a réunion des natures contraires et des qualités séparées. Il doit alors se faire un "mariage indissoluble même à la plus grande violence du feu."

Cette phase marquait la fin du premier degré du Grand Oeuvre.  La suite nous est très bien décrite par Allendy :

      "On obtenait alors le rebis androgyne,"(le rebis est un être double) "c'est à dire un produit évolué mais instable. Il fallait dans un second degré de l'Oeuvre, par la sixième phase appelée sublimation, pousser plus loin l'évolution du rebis au moyen de l'Elexir ; la septième phase, la coagulation, arrêtait cette évolution et la fixait en un stade définitif au moyen de la Teinture."

On était alors censé être en possession de la Pierre philosophale... Les phases quatre, cinq et six peuvent être mélangées, la coagulation se nommer fixation, mais, pour une fois, les alchimistes sont à peu près d'accord sur le sens des mots employés. Evidemment, toutes ces phases ont des correspondances symboliques au niveau psychique et spirituel. Par exemple, la Putréfaction correspondrait aux débuts de l'initiation, au moment où l'on se sent perdu dans les ténèbres. La conjonction représenterait l'union mystique etc. etc. Mais nous n'en sommes pas encore là et la montée des marches sera lente. A vos athanors.

 

 

19/12/2006

La chimie mentale

Citations :

" L'atelier de l'alchimiste, avec son étrange appareillage et ses opérations de transformation chimique a du lui aussi lui servir de stimulant pour l'association libre par élimination partielle du contrôle conscient. ..."

 "Le caractère psychologique de l'alchimie apparait à l'évidence dans la manière dont les traités parlent de chimie. Les éléments y sont tous caractérisés de manière "spirituelle" ou imaginaire, tels le fils des philosphes, l'arbre philosophal, le mercure philosophal, l'oeuf philosophal, la pierre philosophale etc. On insiste aussi à plusieurs reprises sur le fait que l'oeuvre alchimique doit avoir une dimension philosophique qui éclaire sa dimension matérielle si on veut en saisir la véritable signification. L'esprit divin est à l'oeuvre dans la nature, d'où la correspondance entre les connaissances physiques et métaphysiques.

La grande quantité, dans la science hermétique, d'hallucinations, de visions et de rêves explique en partie l'importance majeure assignée par les alchimistes à l'imagination. Celle-ci semble, en dernière analyse, être l'"instrument" premier des fabricants d'or dont les opérations chimiques paraissent avoir servi de prétextes destinés à favoriser des projections d'origine inconsciente. ..."

"Dans le Rosarium il est conseillé à l'alchimiste d'accomplir son oeuvre de la manière suivante : "Et veille à ce que la porte soit bien fermée afin que ce qui est à l'intérieur ne puisse s'échapper et - si Dieu le veut - que tu puisses atteindre le but poursuivi. De même que la Nature accomplit ses opérations petit à petit, de même je voudrais que tu fasses : laisse la nature guider complètement ton imagination. Dans tes observations, tiens compte de la Nature grâce à laquelle les corps se régénèrent dans les entrailles de la Terre. Cela imagine-le de manière véridique et non fantastique"

Dans l'alchimie, l'initié se met au diapason de l'imagination "réaliste", ou vraie, par un acte de méditation. Ruland en dit ce qui suit : "Méditation : nom donné à la conversation intérieure avec un interlocuteur absent, comme dans l'invocation d'une divinité, dans la communion avec soi-même ou avec son ange gardien."

Le caractère méditatif du Grand Oeuvre montre que les alchimistes comprenaient leur "travail" comme un processus de transformation psychique, lui-même envers du processus de transformation chimique. C'est ainsi que les laboratoires alchimiques firent aussi office de laboratoires psychologiques. Il en résulta cette chimie symbolisée de l'alchimie, qui n'est rien d'autre, en fin de compte, que l'alchimie de l'esprit."

         Johanes Fabricius

L'alchimie, ed Sand, p. 10 et 11, 1976, trad. de l'anglais 1996.