27/03/2007
Alchimie et cuisine
L'illustration de l'emblème XXII de l'Atalante fugitive, un ouvrage alchimique de Michel Maïer,1617, ( traduit par E. Perrot, ed. Dervy) montre, dans une cuisine, une femme enceinte devant un feu de bois au dessus duquel est suspendu un grand chaudron. Elle s'apprête à cuire des poissons. Bien d'autres éléments de l'illustration sont fort intéressants (il y a même un chat), mais cette description simplifiée suffit à illustrer le thème de la cuisine qui est très présent dans toute la littérature alchimique.
Michel Maïer, au cours du commentaire, explique, avec un soupçon d'excuse, qu'il n'y a pas de véritable différence entre la cuisson "philosophique" et la cuisson "vulgaire ". Je cite (p. 189) :
"Car de même que la femme amène à maturité des poissons dans l'eau, c'est à dire résout en air et en eau toute leur humidité superflue, les fait bouillir et cuire, le philosophe agit pareillement avec son sujet. Il le fait macérer dans sa propre eau, qui est plus forte que le vinaigre le plus aigre, le liquéfie avec elle, le dissout, le coagule, le fixe dans le vase d'Hermès dont les jointures sont très rigoureusement fermées, comme il convient, de peur que l'eau ne s'exhale et que le contenu du vase ne soit brulé."
Les degrés de la cuisson sont essentiels pour les alchimistes. Les conseils sur la force ou la douceur des cuissons, la composition et la quantité des ingrédients, ont des allures de recettes de cuisine, sans cesse recommencées et améliorées. Maïer lui même, après avoir expliqué l'impossibilité de réaliser quelque partie de l'Oeuvre que ce soit sans avoir trouvé le bon régime du feu, avoue, ce que je crois volontiers, n'avoir "découvert la vérité" qu'au "prix d'un labeur incroyable et non sans y avoir consacré un grand nombre d'années ..."
Le vocabulaire culinaire de l'alchimie est très riche et souvent encore d'actualité. On observe quatre régimes, ou degrés de chaleur, du feu : lent et doux, modéré et tempéré, grand et fort, brûlant et tempétueux. Et encore : vaporeux, nourrissant, sec, humide, sublimant, feu de bain, feu de cendres, feu de charbon, feu de flammes. Qu'est-ce qui cuisait sur ces feux dans les "vases" de l'alchimiste ? Souvent des produits peu ragoûtants que je préfère vous laisser imaginer...
Les processus alchimique sont, aussi, symboliquement comparés à une oeuvre culinaire "de femme". Cela est illustré chez Maïer par la femme enceinte. Il y a là une allusion à la grossesse durant laquelle l'enfant est lentement mijoté dans la chaleur du ventre maternel. La cuisson "oeuvre de femmes" est aussi un passage du cru au cuit, c'est à dire une transmutation.
Si on passe au domaine de la vie pratique, ce que j'appelle l'alchimie quotidienne, la cuisine est destinée (en principe !) à la réussite des mets. Or, qu'est-ce qu'un plat réussi ? C'est, non seulement un plat bien cuit, mais aussi un plat où sont respectées les justes proportions entre les différents éléments, c'est à dire l'harmonie. Que cherchaient les alchimistes Philosophes de la Nature ? A retrouver l'harmonie divine perdue dans la matière. Quelle est la quête de quelques cuisiniers exceptionnels ? Méditer sur l'harmonie des saveurs et tenter de recréer cette harmonie à partie des matériaux que leur offre la nature. On peut alors les qualifier d'"artistes" comme se nommaient entre eux les alchimistes dont l'Oeuvre n'avait pas pour but de fabriquer de "l'or vulgaire", mais l'Or spirituel.
17:20 Publié dans Alchimie | Lien permanent | Commentaires (8) | Tags : écriture, alchimie, spiritualité, cuisine, Perrot, citation, poésie
23/03/2007
Le vase alchimique de la Nature
Dans le vase de la Nature où les fleurs poussent sur le fumier les filles du vent et des embruns cuisinent au plus intime
Ciel terrestre et terre céleste dans le vase de la Nature elles concoctent le grand Oui aux origines de la vie et le rire libérateur d'un ancien orgasme de l'être cascadant les rêves en échos
Corps spiritualisé par l'air esprit perdu dans la matière ce qui fermente dans le vase sera transmuté en son temps ...
15/03/2007
La voie étroite
16:45 Publié dans photo, poésie | Lien permanent | Commentaires (16) | Tags : écriture, photo, poésie, spiritualité
08/03/2007
Henri MICHAUX : poésie curative
Henri Michaux me semble apporter la touche finale (jusqu'à la prochaine fois) à un mouvement de révolte qui est en train de s'apaiser. Vous allez devoir, je le crains, à nouveau me supporter assez régulièrement. Le poème s'intitule : "Toujours son "moi"." On le trouve ,dans son intégralité, à la page 112 du tome I de la Pléiade.
............
je m'affaire dans mes branchages
je me tue dans ma rage
je m'éparpille à chaque pas
je me jette dans mes pieds
je m'engloutis dans ma salive
je me damne dans mon jugement
je me pleure
je me dis : c'est bien fait !
je me hurle au secours
je me refuse l'absolution
je reprends mes supplications
je me refuse toute révision
c'est mérité
et puis au diable, au diable
et grande fuite et crevaison dans le bénitier
.........
Je fais pour mes écorchures la réclame qu'il faut
mais ce n'est tout de même pas si béant que ça.
16:50 Publié dans poésie | Lien permanent | Commentaires (8) | Tags : poésie, citation, littérature, Henri Michaux
01/03/2007
La grotte du Phénix
Nourri par ses racines et lavé par ses pleurs
Vêtu d'une lumière dorée
Redevenu enfant de la puissante Mère
Se courber vers la terre
Pour franchir le passage
Descendre vers la profondeur des mines de métal
Grottes alchimiques
Là où vit le Phénix
Au centre de la fusion
Puis plonger pour revivre
Dans les rivières souterraines de L'Amour
11:20 Publié dans photo, poésie | Lien permanent | Commentaires (4) | Tags : écriture, poésie, amour, alchimie, photo
17/02/2007
Angine métallique
16:15 Publié dans poésie | Lien permanent | Commentaires (13) | Tags : écriture, poésie, amour, photo, alchimie
14/02/2007
Pensée dirigée, rêve et poésie
La conscience humaine a fait un prodigieux effort d'adaptation et de coopération pour qu'un code de communication, à peu près clair, s'établisse entre les hommes parlant la même langue. L'expression onirique participe, quant à elle, de la globalité du matériau d'où est issue l'expression de la vie courante. C.G.Jung a écrit dans l'ouvrage (Métamorphose de l'âme et de ses symboles) qui consomma sa rupture avec S.Freud, que la langue péniblement acquise, celle qu'il appelle notre pensée dirigée, n'est pas autre chose que : "le degré avancé du cri lancé aux compagnons pour leur annoncer qu'on a trouvé de l'eau, que l'ours a été abattu, qu'un orage approche, ou que les loups rôdent autour du campement."(p. 60)
Ce cri de découverte ou d'avertissement, il faut qu'on l'entende, qu'il soir compris. Le langage se construit avec d'autres êtres humains, c'est une "façade", un pont, dont l'unique but est la communication". La pensée dirigée logique, aisément communicable, s'oriente vers l'extérieur, utilise le savoir transmis et s'adapte aux comportements usuels. Cependant, une question se pose : "que se passe- t-il quand nous ne dirigeons pas notre pensée ? " Il est, en effet, impossible de rester en permanence dans un état ce concentration et d'éveil permettant de conserver une pensée d'attention dirigée. On plonge alors dans un état de pensée non dirigée, simplement associative, de suites d'images, de lambeaux de phrases sans signification, bref de rêvasseries...
Nous avons donc à notre disposition deux formes de pensée, la pensée dirigée, et le rêve ou fantasmes. La première, fatiguante demande des efforts de volonté, d'adaptation, d'imitation de la réalité. La seconde rompt avec le réel, est moins extérieure. C'est surtout une pensée libre, ne faisant aucun effort pour se mouler dans ce qui existe déjà.
Si on considère le surréalisme comme une sorte de dictée de l'inconscient, en l'absence du contrôle exercé par la pensée dirigée, son langage serait celui se rapprochant le plus de l'expression onirique. La poésie inspirée, celle qui ne se contente pas de dire le déjà dit, ou de décrire le déjà vu et quitte le niveau de la réalité humaine pour se laisser aller au jeu désintéressé des nouvelles associations, parle la langue du rêve qui, comme elle, exprime tout ou rien selon la possibilité de co-naissance de celui qui la reçoit. C'est de cette poésie que je rêve et dont j'avais envie de vous parler aujourd'hui.
17:10 Publié dans Pensées, interrogations, aphorismes | Lien permanent | Commentaires (10) | Tags : écriture, poésie, Jung, philosophie, pensée, rêve
13/02/2007
Repos : carte postale poétique
C'est une chapelle
Amer
Qui sert de repère
En mer
Au marin qui cherche
Sa terre
Une de mes photo, qui, à mon goût, fait un peu trop carte postale. Cela m'a donné l'idée, mes jours de repos de blog, eh oui, j'ai décidé de me syndiquer à moi-même et de prendre un jour de repos hebdomadaire consacré à la publication de "photos cartes postales" avec, si ça me vient, quelques vers. Un autre jour citation. Le reste du temps il vous faudra subir ma prose où ma poésie. Affectueusement à tous les lecteurs de ce blog.
15:05 Publié dans photo | Lien permanent | Commentaires (10) | Tags : photo, poésie, blog
10/02/2007
La femme Nature
Forte des puissances de la nuit
Nue sur la roche ronde enfantée par les vents
La femme est venue offrir sa chair humide d'un désir d'Océan à l'aimant de la mer montante
Les langues du soleil
Tout près d'être englouti
Ont caressé sa peau
En spasmes d'agonie
Le ressac a chanté
Au rythme de l'amour
Et le feu a brulé
Dans la pierre mouillée
Quand ses reins ont quitté leur lit granitique
Quand son ventre s'est tendu vers le ciel
Quand ses cuisses lourdes se sont ouvertes à la caresse des gouttes
La vague est arrivée aspirant la fontaine
Cri et jaillissement
De son eau féminine
Un don à la Nature
Aux temps des dieux multiples
16:50 Publié dans poésie | Lien permanent | Commentaires (12) | Tags : écriture, poésie, amour, spiritualité, photo, nature
03/02/2007
Fréquences
Quand vibre la note intérieure
L'inouïe fleur de l'ouïe s'épanouit
Les rires purs éclatent tout nus
Les couleurs chantent leur fusion
Et l'on arpège au bout du son
Spiralant
Balançant
Dans un bain de fréquences
Sur des cordes vibrantes
Lianes de lumière
Surfant l'univers
Jusqu'au son primordial
Là où pulse la Source
16:45 Publié dans poésie | Lien permanent | Commentaires (10) | Tags : écriture, poésie, spiritualité, photo, musique, mathématiques
02/02/2007
Obscurité et poésie chez les alchimistes
Les alchimistes ont des difficultés à se comprendre entre eux. Ils admettent écrire d'une façon obscure mais sans imaginer qu'il puisse exister une possibilité d'écrire différemment. Ils utilisent des concepts fondamentaux et les habillent ensuite d'analogies et de symboles appartenant à chacun d'eux. L'explication de C.G. Jung est la suivante:
"La méthode de l'alchimie, psychologiquement parlant, est celle de l'amplification illimitée. L'amplificatio convient toujours lorsqu'on à affaire à une expérience obscure, qui est si vaguement ébauchée qu'elle doit être amplifiée et élargie, en étant placée dans un contexte psychologique, afin d'être comprise."
Nous verrons que la même méthode est applicable à l'interprétation des rêves.
Pourquoi une telle variété de symboles désignant les processus ou agents ou aboutissements de la transformation alchimique ? Cela découle à la fois de la nécessité du secret et aussi de l'interchangeabilité de matériaux de l'Oeuvre qui sont censés être tout d'abord antagonistes. Par exemple l'eau et le feu, une paire d'opposés typiques, sont, si on en croit les auteurs "un et un seul".
Le lecteur d'ouvrages alchimiques se trouve donc devant des noms de substances signifiant à peu près n'importe quoi. En outre, plus une substance est utilisée, ou importante, plus est grande la multiplicité des noms et des allusions symboliques servant à la désigner. On comprend la perplexité de Jung, pendant les dix ans (quelle obstination ! ) où il fut en contact avec la littérature alchimiste, y cherchant une réponse, mais sans rien y comprendre par excès de logique. Il aurait du faire jouer plus tôt une des multiple facettes de sa personnalité, son côté poète refoulé. En effet, pour moi, l'alchimie, s'apparente à la poésie la plus fantasque. Elle va chercher son énorme vocabulaire dans tous les domaines : teinturiers, vins et liqueurs, métaux, la nature, les animaux, l'amour physique et spirituel et bien d'autres encore. On se demande, en lisant certains textes, s'ils n'ont pas été écrits par des surréalistes.
Je vais vous citer une toute petite partie des noms donnés à la Pierre des alchimistes par les auteurs. Je suis certaine que certains des talentueux poètes qui fréquentent ce blog seraient capables d'en faire une délirante poésie :
Pierre et non pierre - Etoile - Pierre de Paradis - pierre animale - Sanguinaire - Solaire - Eau courante - Eau éternelle - feu ardent - terre morte - le fugitif - le généreux - l'objet précieux - l'infamie avilie - la gloire dominante - la pierre tendre - merveilleuse - Philosophale - sacrée - secrète - le Sauveur. .........et j'en passe.
16:55 Publié dans Alchimie | Lien permanent | Commentaires (10) | Tags : écriture, alchimie, Jung, poésie, rêve
26/01/2007
Âmes grisées
Quand on se canalise
Quand on analyse
Quand on se dialyse
Quand on banalise
Aseptisant sans cesse
Les joies et les ivresses
Les excès de tendresse
Pour la vie et ses liesses
On bâtit un grand mur
De pierres granitiques
Tout autour de la chair
Et l'âme devient grise
Parfois le mur s'écroule
Attaqué
Explosé
Par la vague puissante
De forces inconnues
Dont l'alcool est si fort
Que l'âme en est grisée
Ca s'appelle l'AMOUR
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18/01/2007
Christ sur la terre
Allant au cimetière
Promenade coutumière
Imaginaire
Méditation
Des histoires singulières
Inscrites dans la pierre
J'ai vu dans la poussière
D'une absence de tombe
Un vieux christ tout rongé
Abimé par les eaux
Dissolution de chair
Métallique
Alchimique
S'exercer à la mort n'est pas toujours facile
Quand le symbole vivant est tué par le temps
16:55 Publié dans photo, poésie | Lien permanent | Commentaires (6) | Tags : écriture, poésie, spiritualité, christ, photo
17/01/2007
Paroles de la mystique juive
"Quand les prophètes ne furent plus, leur place fut prise par les Sages, qui, en un sens, surpassèrent même les prophètes ; et en l'absence des Sages, les choses à venir se sont révélées dans les rêves."
le Zohar
"Toute science, toute religion, toute philosophie, a sa mélodie particulière. Plus haute est la religion ou la science, plus élevée est sa musique."
"Les jours passent, sont écoulés, et l'on découvre qu'on n'a jamais eu le temps de penser une fois vraiment. ... Celui qui ne médite pas ne peut avoir la sagesse."
"En vérité, l'unique chose dont l'homme a peur est en lui, et l'unique chose qu'il désire ardemment est en lui."
Rabbi Nachman de Bratislava
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13/01/2007
Femmes de pierre et de miel
Sculpture : Céline, "l'atelier de céline". Lien dans mes favoris.
Femmes d'ombre et de lumière
Femmes de pierre et de miel
Les soies de vos chevelures
Tissent un lien
Entre la terre et le ciel
Corps ployant comme des tiges
Quand s'enfonce dans votre terre
Le soc d'une charrue de chair
Vous donnez ou refusez
La puissance d'un univers
Femmes
Vous êtes filles de Nature
Votre sexe pleure et enfante
Mais depuis les origines
Passant par la porte étroite
Qu'on appelle de service
Vous cheminez patiemment
Vers l'étoile monadique
De l'Amour
16:55 Publié dans poésie | Lien permanent | Commentaires (8) | Tags : écriture, poésie, spiritualité, amour, nature, photo